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Nigeria : Selon Luc Banemeck consultant en stratégie, Boko Haram n’est qu’un outil des groupes d’intérêts...

26 Janvier 2012 , Rédigé par afrohistorama, Toute l'histoire sans histoire

Nigeria : Selon Luc Banemeck Consultant en stratégie, Boko Haram n’est qu’un outil des groupes d’intérêts qui écument le Nigéria.

  Luc-banemeck-copie-1.jpg Luc Banemeck, Strategist Consultant.

              Depuis plusieurs mois le Nigeria est rythmé dans son flan Nord-est par une vague d’attentats meurtriers attribués à Boko haram une organisation qualifiée d’islamiste et terroriste par les experts occidentaux.

Fondée en 2002 par Mohamed Yusuf, un Imam de Maiduguri, capitale de l’Etat de Borno cette organisation a déjà été citée par le passé dans plusieurs attentats meurtriers visant les commissariats de police, les casernes de l’armée, les gares, les hôtels, débits de boissons, bâtiments officiels et églises chrétiennes.

De l’avis d’experts Africains les choses ne sont pas aussi simples. La présentation occidentale est un calque des organisations moyen-orientales. Tout ceci ressemble plus à du copie coller que l’on nous a habitué dès que le problème de violence  dans cette région de l’Afrique fait son apparition.

Pour allez au fond du problème, nous devons absolument demander l’avis des experts Africains non-partisans. Pour ce faire, nous avons fait appel à notre spécialiste maison. Luc Banemeck consultant en Stratégie des organisations.

M. Ntohol: Pouvez-vous nous expliquer  les causes de la violence qui sévit aujourd’hui dans la partie  nord-est du Nigeria ?

Luc Banemeck : Tout d’abord je remercie l’opportunité qui m’est donné de pouvoir éclaircir aux lecteurs d’Afrohistorama, la situation qui de prime abord parait facile à comprendre. En accusant Boko Haram le gouvernement Nigérian peut rassurer les investisseurs et les populations. Ce qui ne veut pas dire que le responsable c’est Boko Haram. Pour mieux comprendre ces violences il faut revisiter l’histoire du Nigeria.

Le Nigeria est un pays complexe sur le plan institutionnel et démographique depuis son indépendance en 1960.

Le Nigéria est un pays d'Afrique occidentale. Le français et l'anglais ont le statut de langues officielles mais l’haoussa, le yorouba, l'ibo et le fulani sont aussi des langues utilisées. Les musulmans sont concentrés au Nord; dans les autres régions les populations de confession chrétienne ou animiste sont prépondérantes.

En 1960 lorsque le pays obtient son indépendance vis-à-vis de la grande Bretagne. Le pays est alors divisé en 3 régions disposant d'une large autonomie, compte 34 millions d'habitants et 250 différentes ethnies.

 Aujourd’hui le Nigeria compte 36 États et le territoire de la capitale fédérale Abuja ,162 millions d’habitants repartis sur 967 000 km². Donc en 50 ans d’existence, la population a été multipliée par  environ 5, les ressources aussi.

Sur le plan institutionnel et politique, de (1963-1965) La première constitution républicaine laisse le pays dans une relative stabilité. En revanche dès 1966 un coup d'État fomenté par différents groupes militaires amène au pouvoir le général Ironsi, d'origine Ibo, qui est assassiné quelques mois plus tard. Les meneurs de ce nouveau coup d'État accroissent le pouvoir du gouvernement fédéral et changent la subdivision du pays qui est désormais constitué de 12 États. Les Ibos, ethnie majoritaire de l'est du pays, sont alors victimes de représailles tribales sanglantes qui aboutissent en 1967 à la sécession de la république du Biafra. S'ensuit une terrible guerre (cf. Guerre du Biafra) qui s'achève par une capitulation des indépendantistes le 12 janvier 1970.

En 1975 un coup d'État, sans effusion de sang, amène Murtala Ramat Mohammed au pouvoir. Il promet un retour rapide à la démocratie, mais il est tué dans un coup d'État avorté et est remplacé par son second Olusegun Obasanjo. Une nouvelle constitution est établie en 1977 et les premières élections arrivent en 1979, gagnées par Shehu Shagari.

En 1983 un nouveau coup d'État replonge le pays sous la dictature du conseil militaire suprême. En 1993, après des élections annulées par le gouvernement militaire, le général Sani Abacha arrive à la tête de l'État. À sa mort soudaine en 1998, Abdulsalami Abubakar prend le pouvoir et rétablit la constitution de 1979. En 1999, les premières élections démocratiques depuis 16 ans sont gagnées par Olusegun Obasanjo, qui est réélu lors des turbulentes élections de 2003. En 2007 des élections une nouvelle fois agitées amènent au pouvoir le successeur désigné d'Olusegun Obasanjo : Umaru Yar'Adua.

Umaru Yar'Adua décède le 5 mai 2010 des suites de complications rénaux en Arabie saoudite. Goodluck Ebele Jonathan lui succède officiellement le 6 mai 2010.

A la lumière de ce que vous venez de lire, vous remarquerez que ce pays n’a de cesse connu que violences, coups militaires et dictatures depuis 1960.

Malgré cette violence le pays est devenu un géant de l’Afrique, grand producteur de pétrole et de plusieurs autres ressources qui composent l’essentiel à plus 70% des recettes financières. Et c’est exactement la répartition de ces revenus qui est le véritable problème du Nigeria et le principal enjeu des violences en cours. Tant que cette répartition  reste inégalitaire le Nigeria ne sera jamais en paix.

Donc  pour moi, allez chercher les raisons sur le plan religieux n’est que diversion. Et c’est en cela que l’analyse des panafricanistes diffère de celle des Africanistes occidentaux.

M. Ntohol : Selon vous la répartition inégalitaire des ressources du pays est la véritable matrice de toutes ces violences?

Luc Banemeck : Bien entendu, d’ailleurs il y a une violence permanente qui resurgit de temps à autres. La piraterie en haute mer dans le golfe de Guinée. Que revendiquent les pirates ? La répartition des richesses. Ils accusent le régime central d’Abuja de se servir des ressources sans retour en investissement localement.

 Depuis 1960, tous les régimes politiques qui se sont succédés au pouvoir n’ont agit que soit pour leur intérêt personnel, ethnique ou étrangers. Pas pour les intérêts des Nigérians. Ce qui a plongé la grande majorité de la population dans une misère sans nom. Lagos l’ancienne capitale est devenu un bidonville à ciel ouvert. Dans  ces conditions il ne faut pas sortir de la cuisse de Jupiter pour comprendre  le résultat d’une telle politique.

M. Ntohol : Si je comprends bien, Boko Haram est la conséquence de la situation de misère de la population Nigériane ?

Luc Banemeck : Exacte. D’ailleurs Le nom Boko Haram  qui provient à la fois de la langue haoussa et de l’arabe signifie mot à mot « Occidentalisation interdite » en d’autres mots non à l’occidentalisation du Nigeria parce que selon ses adeptes c’est la culture occidentale qui est à l’origine de cette misère qui mine le pays.

M.Ntohol : Quels sont les objectifs de ce mouvement ?

Luc Banemeck : Comme son nom l’indique, son objectif consiste à lutter contre l’occidentalisation du Nigeria. Cette lutte se manifeste par les attaques contre tous les symboles qui représentent cette culture coccidentale au Nigeria. L’église chrétienne étant le symbole le plus représentatif, d’où sa présence en ligne de mire.

En revanche l’attaque des forces de sécurité ne serait qu’un sous objectif participant  à l’accomplissement du but ultime sur le plan operationnel, à l’affaiblissement du pouvoir central et à l’instauration d’un régime politique qui permettra l’instauration de la culture Africaine et l’islam comme religion officielle.

Cette entreprise terroriste qu’on attribut à Boko Haram est totalement à la deshauteur de ce mouvement en raison de sa logistique actuelle. Ce qui veut dire si Boko Haram est peut-etre l’auteur, il y a absolument une main invisible opérant en parallèle en termes de facilitateur.

M. Ntohol : Si Boko haram est incapable de monter de telles opérations de grande envergure comme celles qui ont coutées la vie à plus 160 personnes dans le nord du Nigeria alors qui pourrait être derrière toute cette violence?

Luc Banemeck : Je pense à plusieurs groupes d’intérêts aux objectifs convergents.

-          Les militaires Nigérians.

 Depuis 1966 ils occupent les reines du pouvoir sans partage. Même si pendant un temps ils ont été absents à travers des hommes de pailles. Ils ont toujours contrôlés les leviers du pouvoir jusqu’en 2011.

Or depuis les Elections présidentielles de 2011, ils ont été les premiers perdants dans l’histoire démocratique en marche au Nigeria. Ils pourraient  très bien se servir de Boko Haram pour créer le chaos, déstabiliser le pays, et revenir en sauveur.

-          Les occidentaux, en tête les États-Unis.

On sait que la stratégie  dans le cadre du contrôle des ressources naturelles du Golfe de Guinée par les occidentaux  ne date pas d’aujourd’hui.  Alors un Nigeria affaibli  divisé serait du pain béni. Tandis qu’un Nigeria fort serait un handicap.

Comme Pour l’un ou l’autre groupe d’intérêts seul l’objectif compte et Boko Haram n’est un outil pouvant permettre d’atteindre ses objectifs à moyen et/ou long terme.

M. Ntohol : Pour vous Boko Haram n’est qu’un jouet dans les mains de ces groupes d’intérêts mafieux ?

Luc Banemeck : Tout à fait. Boko haram est pris dans le même engrenage qu’Al Qaeda. Nous avons très bien vu comment cette organisation a travaillé main dans la main avec l’OTAN en Libye. Pourquoi Boko Haram ne ferait-il pas la même chose au Nigeria. On ne change pas ce qui marche, on l’adapte.

Au Nigeria aujourd’hui existe trois forces en compétition :

- Les groupes d’intérêts locaux composés de :

  de militaires, les magnats du pétrole et les politiciens véreux.

  - Les groupes d’intérêts étranger composés de :

des compagnies pétrolières, des pays occidentaux comme les États-Unis qui sont a la recherche d’une base militaire pour leur Africom et du pétrole.

-Le groupes d’intérêts populaires composés de :

- Toutes les organisations « Zorro» revendiquant la répartition équilibrées des ressources du pays (Pirates du Golfe, Boko Haram etc.).

M. Ntohol : Comment en finir avec cette violence ?

Luc Banemeck : Il faut rééquilibrer la répartition des ressources naturelles du pays pour en finir avec cette violence. Le Nigeria a besoin d’un Nigérian exceptionnel capable de comprendre réellement les enjeux et les forces en présences. Mais j’ai peur que le gouvernement actuel du Nigeria s’enlise dans la répression ou la négociation avec Boko Haram en suivant l’avis des occidentaux. Si rien n’est fait j’ai peur pour l’avenir de la fédération du Nigéria.

A suivre…

Interview réalisé par M. Ntohol pour Afrihistorama.

 

 

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