CHARLES ATEBA EYENE, RÉVOLUTION 2.0 !
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Charles Ateba Eyene est mort hier Vendredi 21 février 2014 au Centre hospitalier universitaire de Yaoundé, suite d’une insuffisance rénale.
OUI, la mort a encore frappé et a pris sur son chemin un jeune valeureux combattant tombé sur le champ de bataille. Porté par des convictions profondes, fortes et solides, Charles Ateba Eyene s’était engagé dans le combat politique et idéologique dans l’intérêt collectif de la nation mais surtout en pensant à cette jeunesse camerounaise pour qui ce combat mérite d’être mené avec hargne et rigueur.
Ateba Eyene ne craignait point la mort et n’hésitait pas à le rappeler à tous ceux qui souhaitaient l’entendre. D’ailleurs, à ce propos, ses combats politiques et idéologiques au sein de son parti et contre les réseaux mafieux de la République qu’il dénonçait en permanence en témoignent.
Charles Ateba Eyene lègue comme héritage à la jeunesse camerounaise : travail, bravoure, éthique et sens de la justice. Il avait décidé d’aborder fièrement l’éloquence et la profondeur des mots contre les armes et un système qui ne reculerait devant rien pour imposer sa loi au peuple. Au cœur de cette éloquence se trouvait un homme et pas des moindres car sa complexité laissait certains dubitatifs, voire perplexes sur la forme de la méthode. Ce qui est sûr, il ne laissait personne indifférent car son combat était juste.
Observons le graphique ci-dessous: c’est l’historiographie du Cameroun avec plusieurs étapes importantes :
- La période du protectorat allemand, du 12 juillet 1884 au 4 mars 1916.
- L’invasion suivie de l’installation des administrations française et britannique, du 4 mars 1916 au 1er janvier 1960 et au 1er octobre 1961. Cette période est aussi marquée par la révolte face à la brutalité allemande, et à partir de 1916, de la révolte face à la division de la patrie kamerunaise par les franco-britanniques et des brimades telles que l’impôt de capitation, l’absence de droits humains et politiques.
- 20 juillet 1922 : le placement du Kamerun sous mandat de la Société des Nations.
- Août 1944 : tournant majeur dans l’histoire du pays et de sa lutte politique. Cette année-là, les Camerounais ont acquis le droit syndical, à la faveur d’un décret de René Pléven, Commissaire aux colonies de Charles de Gaulle.
- En 1960 et 1961, l’indépendance et la réunification sont apparues comme l’aboutissement d’une longue lutte et d’une longue espérance de la part de la population camerounaise.
- Ces moments sont suivis par deux périodes que l’on espérait être le point de départ pour la prospérité du pays: a) 1958 et l’ascension de Ahmadou Ahidjo à la magistrature suprême; b) 6 novembre 1982, Paul Biya a introduit l’idéologie de «l’intégration nationale», en prolongement à celle de «l’unité nationale» de son prédécesseur.
La première révolution au Cameroun est née de l’idée de la possibilité pour la population de recouvrer sa liberté d’antan, perdue du fait de l’invasion coloniale. Cette révolution a débouché, tout naturellement, sur la revendication de l’indépendance et le départ des Blancs. Il s’agit là, de LA RÉVOLUTION 1.0 !
Dr. Charles Ateba Eyene a initié une nouvelle RÉVOLUTION. Il réveille la jeunesse camerounaise en réussissant là où tout le peuple a échoué : dénoncer et faire trembler un système corrompu, déviant et individualiste de l’ère Biya.
L’élément déterminant de la « Révolution Charles Ateba Eyene » démontrant l’absence de JUSTICE ET D’ETHIQUE dans notre pays, est la profondeur du fossé qui sépare d’une part, le caractère très alarmant de la demande sociale dans le sens large du terme, aussi bien dans ses exigences relatives à l’accès aux services sociaux de base tels que l’éducation, la sante, l’eau, l’électricité, en passant par l’emploi des jeunes, ainsi que sa demande démocratique pour la liberté d’expression et d’autre part, l’épaisseur de l’archaïsme politique, doublé de l’extrême immoralité de l’exercice du pouvoir par la corruption et la mafia organisée.
À travers sa démarche et son courage, Charles Ateba Eyene a pu mettre en évidence l’existence d’un réel fossé générationnel dans notre pays entre les moins de quarante-cinq ans et ceux de plus de soixante ans sans oublier au milieu, une sorte de no man’s land. Cette réalité nous oblige à admettre que nous aurons besoin d’un grand travail de soudure intergénérationnelle et que nous allons devoir nous parler franchement afin de recréer ensemble un espace commun où il fait bon de vivre ensemble, si l’on ne souhaite pas que le tissu social se fissure davantage avec des conséquences désastreuses pour toute une nation qui aspire à la prospérité.
Charles Ateba Eyene laisse à la jeunesse camerounaise un héritage dont chacun d’entre-nous aura le devoir de s’approprier et de contextualiser afin de faire face aux grands défis et enjeux de demain.
Va en paix Charles et vive ta RÉVOLUTION 2.0 ! « L’homme illustre a pour tombeau la terre entière », Périclès, 430 avant Jésus-Christ
par Dr Alain Nkoyock
Après qu’il eût résisté aux pogroms coloniaux et à deux dictatures, l’une maniaque et l’autre fainéante et bordélique, le peuple camerounais échappera-t-il au filicide auquel il est main
Après qu’il eût résisté aux pogroms coloniaux et à deux dictatures, l’une maniaque et l’autre fainéante et bordélique, le peuple camerounais échappera-t-il au filicide auquel il est maintenant convié ?
Venant Mboua
Journaliste et écrivain
Objet : Votre nomination au poste de Président du comité de normalisation du droit d’auteur.
Cher monsieur Seuna,
Ce message est en réalité le témoignage d’un ancien « brûlé » du droit d’auteur camerounais, ce « droit du ministre de la Culture ».
D’emblée, je dois vous dire que dans le feuilleton de série B en propagation ces derniers temps et dont Ndedi Eyango et Ama Tutu Muna tiennent les rôles principaux tandis que Roméo Dicka campe le premier rôle de soutien, je défends Le Prince des montagnes. Rassurez-vous, il n’est pas mon ami. Je ne le connais qu’à la télé. Il est probable qu’il n’a jamais entendu parler de moi. Mais je suis ce spectateur que le scénariste de séries brésiliennes a réussi à conditionner, par son intrigue à deux balles, bâtie sur deux types de personnages : les honnêtes, gentils, sans défense, sans pouvoirs, martyrisés et les malhonnêtes, puissants, cyniques et méchants. Plusieurs semaines après le début du feuilleton, mon cœur bat encore plus pour Ndedi Eyango et je déteste encore plus le personnage de ministre et ses soutiens.
Le discours du chanteur de Nkongsamba sur le plateau de STV m’a ému. C’est la première fois que je l’entendais parler en dehors des chansons. Je découvre qu’il est un artiste et homme d’affaires lucide. Et, vous qui connaissez bien les couloirs et les mentalités du ministère de la Culture, vous avez compris pourquoi la ministre de la culture le combat : c’est un élu qui, visiblement, n’a pas su dealer. C’est un naïf qui pensait venir là pour aider à résoudre les problèmes alors que ce n’est pas ce qu’on attend d’un élu.
C’est l’erreur que j’avais commise en 2002!
Deux décennies de désordre organisé
Je vous connais depuis que je suis de près le droit d’auteur en qualité de journaliste, c’est-à-dire, une personne généralement bien informée mais, parfois aussi, intoxiquée par des sources qui ont leurs buts à atteindre. Ce sont Sam Mbende et Emmanuel Keki Manyo, mon metteur en scène aujourd’hui disparu, qui me pousseront finalement à devenir un acteur du secteur. Je savais déjà que depuis l’avènement de la gestion collective, après le vent de libéralisation de 1990, le droit d’auteur se faisait entendre uniquement par des querelles. Les ayants droit se battaient entre eux, divisés en camps avec, comme arbitre de mauvaise foi (pour ne pas dire, comme au foot du quartier, «arbitre corrompu »), le ministre de la Culture, quand ce dernier ne se colletait pas carrément avec l’un des camps. Les exemples sont légion : Stanislas Melonè (premier PCA de Socinada) contre les musiciens; le ministre Toko Mangan contre Sanding Beng. Le ministre Oyono Ferdinand contre Esso Essomba. Ferdinand Oyono contre Clément Tjomb (et ce dossier vous le connaissez bien). Oyono Ferdinand contre Manu Dibango, le ministre Oyono Ferdinand encore contre Mono Ndjana. La situation n’a pas changé après Oyono : Ama Tutu Muna contre Sam Mbende et aujourd’hui, la même Tutu Muna contre Ndedi Eyango.
Au total, plus de deux décennies de désordre cyniquement bien organisé par l’autorité de tutelle. Cela ne m’a pas empêché de penser que je pouvais apporter ma contribution, comme si, avant moi, il n’y avait pas eu de génie pour aider ce droit d’auteur à fonctionner. Et pan, sur ma grosse tête prétentieuse!
J’ai participé aux séances de concertation que vous dirigiez avant la rédaction de la loi 2000. Par la suite, j’ai contribué à la fondation de la Sociladra, la société des droits de la littérature et des arts dramatiques. Cette expérience m’avait encore poussé à y croire. On l’a sans doute oublié aujourd’hui, la naissance de Sociladra aurait pu survenir dans le sang. Deux camps se battaient et aucun ne voulait rien lâcher. Une guerre fratricide a opposé Pabé Mongo et Mono Ndjana pendant des mois. Féroces, cruelles, les attaques personnelles succédaient aux menaces physiques…
Mais le jour de l’assemblée générale fondatrice et élective, sans la supervision d’aucun fonctionnaire ni d’aucun ministre, après une demie journée de chicane, les deux camps se sont assis, se sont parlés avec sagesse : « c’est notre bien commun », entendait-on ce soir-là. Un conseil d’administration consensuel a été constitué, selon les textes et la loi.
J’ai vu des gens qui se battaient sans pitié pendant des mois fraterniser sincèrement après l’assemblée générale, certains blaguant même sur les intrigues qu’ils avaient fomentées. Je me suis dis que les artistes sont une famille qui peut avoir des discordes sans se disloquer, s’il ne vient pas un intrus pour vicier les disputes. En effet, ils font le même job, vivent la même galère camerounaise, jouent sur les mêmes scènes, subissent le même mépris gouvernemental, etc.
Ce sont des forces étrangères aux intérêts des auteurs qui organisent la pagaille. Ces forces proviennent surtout du ministère de la Culture. Je ne vous apprends rien. Les divergences entre membres s’aggravent parce que, généralement, le ministre prend position pour un camp, bien souvent pour le camp le plus malhonnête et le plus illégal. Le ministre et ses équipes utilisent les faiblesses (elles sont nombreuses) des créateurs des œuvres de l’esprit, pour les soumettre et leur voler leurs droits. Ce sont eux, qu’Hubert Mono Ndjana avait appelé, « les prédateurs ».
Les manipulés et les prédateurs
J’ai pu voir, lors de la nomination d’un directeur général à la Sociladra, des pères et mères de familles changer une résolution votée en début de séance, juste parce qu’en cours de réunion, un message annonçait que le ministre leur a promis à chacun 100.000 FCFA et qu’ils venaient de manger un plat de ndolè arrosé de vins et de whisky pendant la pause. Et ceci n’est pas un sketch! Le ministre tenait à imposer un de vos collaborateurs de la Cellule juridique comme directeur général de la Sociladra. Il l’a fait!
J’ai encore vu en 2006, un collègue comédien, engagé comme nous à résister aux manœuvres autoritaires de la CPMC, s’écrouler carrément lorsqu’il a été annoncé qu’il n’y aurait pas de perdiem pour la séance du conseil. Il m’a dit, larmoyant : « j’abandonne, je vais demander des excuses au président (de la CPMC), j’ai besoin d’argent, 200.000 FCFA. Mon fils doit reprendre l’école ce lundi ». Il était sincère. Il l’a fait. Ce jour-là, j’ai compris que combattre ne servait à rien, que je n’étais pas assez fort et armé pour lutter longtemps. Ce jour-là aussi, j’ai décidé de quitter ce milieu, même si j’avais continué l’agitation, avec d’autres camarades, « juste pour embêter », disions-nous.
En effet, en dehors de l’assemblée générale fondatrice, toutes les autres assemblées de la Sociladra ont échappé aux membres. En 2005, je fais un bluff dans le journal Mutations (mon confrère, Thiéry Gervais Gango qui m’a interviewé, m’en veut encore pour cela) : j’annonce ma candidature au poste de PCA. Je suis journaliste au Messager, à l’époque, je couvre ou je suis organisateur d’événements culturels. J’ai la sympathie et le soutien de beaucoup de membres de la Sociladra et cela laisse penser que je suis un candidat hyper favori. Le lendemain de la publication de l’article, le président de la CPMC me rencontre, en votre présence : « il faut que tu retires ta candidature, parce que le ministre d’État (Oyono Ferdinand) ne peut pas accepter qu’un anarchiste comme toi devienne le président de la Sociladra », me dit frontalement le président de la CPMC. « Et si je maintenais quand même ma candidature? » ai-je avancé. La réponse fut nette : « il n’y aura jamais d’assemblée générale de la Sociladra et nous, on va continuer de gérer votre société ». Vous étiez-là, rappelez-vous. Rappelez-vous aussi que mon collègue du Messager, Souley Onohiolo, était avec moi et que vous avez eu un échange très rude, pour ne pas dire plus.
Le conseil d’administration formé cette année-là, fut « dissout » l’année suivante, par le président de la CPMC, à travers une interview à Cameroon Tribune (!!!). Le président de ce conseil qui lui obéissait comme un gamin, s’était en fin rebellé contre ses abus. Il fallait « l’occire », constata plus tard, Mono Ndjana lui-même.
Pour toutes les sociétés, la CPMC, avait déjà, depuis un an, mué en organisatrice des assemblées générales (elle en jugeait de l’opportunité, fixait les dates, choisissait les candidats, etc.) et gérait le compte commun du droit d’auteur. On a même vu la CPMC organiser…les deuils des membres et accorder des subventions aux artistes !!! Des activités qui sortent totalement de son rôle et du cadre du droit d’auteur. Entre temps, très peu de choses ont changé de cette hyper activité, au regard de ce que j’apprends des médias.
Ce n’était pourtant pas faute d’avoir des personnes compétentes. Cette CPMC était dirigée par l’un des plus brillants hommes de droit de notre université, Magloire Ondoa. Il y avait d’autres grosses compétences, des fiscalistes, des avocats, des universitaires dont …vous-même, Christophe Seuna! Mais de toute évidence, ces personnages ne mettaient pas leur énergie et leurs vastes connaissances au service des sociétés. Toute la démarche de la commission semblait servir des intérêts autres que ceux des membres. Instructions ministérielles ou initiatives personnelles?
Avant de prendre la tête de « ces choses » créées par Tutu Muna, pouvez-vous dire aux ayants droit ce qui s’est réellement passé avec cette fameuse CPMC où on ne vous voyait plus, vous, le rapporteur? D’ailleurs, avant la fin de l’année 2005, on ne vous voyait même plus nulle part, sur les dossiers du droit d’auteur, tout chef de Cellule juridique que vous demeuriez...
Changer quoi?
Aujourd’hui, en créant « les comités », Tutu Muna nous remet la méthode Oyono. Incapable de trancher entre deux demandes de constitution de société de catégorie B, le défunt ministre avait opté pour sa société à lui. Il fit appel à Manu Dibango. Quelques mois plus tard, il le faisait débarquer sans façon en lui retirant « son agrément ». Pour noyer le bruit que les malheurs de Manu avaient provoqué, on convoqua des séances dites des « États généraux du droit d’auteur », par catégorie. Ce sont ces travaux qui ont défini la base des textes des sociétés actuelles. On a utilisé les sociétés de gestion collective pour distraire afin qu’on oublie Manu Dibango; comme jadis, la loi 2000 (une loi généreuse, du reste, pour les sociétés de gestion collective) fut un prétexte pour régler ses comptes à Esso Essomba de la Socinada. De même, au lieu de faire un audit de la gestion du droit d’auteur à son arrivée, Tutu Muna s’est contentée d’attaquer Sam Mbende, utilisant comme prétexte, la mauvaise gestion puis…des mauvaises élections (!) pour retirer l’agrément à la CMC. Vous savez tout cela.
Pouvez-vous aussi dire aux ayants droit pourquoi l’audit fait si peur aux autorités de la Culture? Nous l’avions demandé en 2006, en vain. Ndedi Eyango, en s’accrochant naïvement à cette idée, apparaît comme un éléphant furieux dans une vaissellerie. Pour sauver ses plats, il faut absolument abattre la bête. Dans le cas de nos sociétés aujourd’hui, des membres prébendiers aux ministres gourmands, en passant par des fonctionnaires braqueurs de caisses, on ne sait où commence et où s’arrête la chaîne de vaisselle à protéger.. Il me semble que vous, vous connaissez bien cette chaîne-là que Tutu Muna veut protéger en vous désignant à la tête de ces « comités ». Car que peuvent ces « trucs »? Je vous laisse répondre à l’opinion nationale dans quelques mois. Tutu Muna imite la Fecafoot dans l’esbroufe (comité de normalisation aussi prédateur que les organes antérieurs) mais ignore l’attitude des gens du foot quant à la gestion des compatriotes de la diaspora…
M. Christophe Seuna, le président du machin de normalisation que vous êtes est aussi celui qui a écrit la loi 2000. Qui a piétiné cette loi, les membres des sociétés ou les autorités de tutelle? S’il vous plaît, éclairez les Camerounais sur la question. Que va-t-on vous demander d’y changer, La loi que les ministres autocrates et gloutons ne respectent pas ou la mentalité des membres pressureurs? On vous a adjoint quelques innocentes personnes et une bande de myrmidons du système, aussi inutiles que nuisibles, de bons « créateurs d’impossibilités » depuis l’an 2000 au moins, qui n’ont qu’un rêve, vivre – grassement et facilement – de l’argent du droit d’auteur dont la plupart ne sait et ne comprend rien. Au fond de vous-même, vous savez que ces hommes et femmes n’ont aucune solution pour faire avancer la cause des auteurs. Vous les connaissez, vous les avez vus à l’épreuve depuis au moins une décennie! Pourquoi acceptez-vous cette mascarade? La responsabilité de l’universitaire que vous êtes, pétri d’expérience dans le domaine, ne vous obligeait-elle pas à décliner cette offre pourrie ? Sur qui peuvent donc compter les Camerounais pour une rédemption de notre pays, si des élites comme vous ne sont pas capables de remettre en cause l’ordre malsain établi ?
La faute au système
En fait, M. Seuna, je ne vous blâme pas. Je me plains, un peu désespéré. Je ne blâme pas non plus Tutu Muna Elle est un produit du système régnant depuis la colonisation française et auquel son père, Muna Tandeng, a adhéré jusqu’à la fin de sa carrière politique. Quand elle est arrivée au ministère de la Culture, elle a affiché une fausse humilité qui nous avait poussés à la défendre, face à la horde de nostalgiques d’Oyono. Mais l’imposture dont elle est issue a vite repris le dessus sur elle.
Cette imposture qui prospère chez nous nous détruit au quotidien et nous ne semblons même pas le constater. Qui avait imaginé que des habitants du Cameroun pouvaient se déchirer un jour sur des médias sociaux, les plateaux de radios et télévisons, autour de la nationalité d’un enfant mboo de Nkongsamba que toute la nation a vu naître et progresser dans sa carrière par son talent et son travail ? À cause des gangs de prédateurs du droit d’auteur, le Cameroun a désormais deux catégories d’enfants : les Camerounais du Cameroun, ceux qui n’ont pas pu ou voulu quitter le Cameroun (ils sont les « vrais », les patriotes, les gardiens de nos lois) et les Camerounais vivant à l’étranger, des enfants déshérités parce que mangeurs à tous les râteliers, espions des puissances étrangères dont ils ont pris la nationalité, des agresseurs sans scrupule et sans morale qui s’imaginent que vivre à l’étranger les exonère du respect de nos lois à l’équité indiscutable. On en vient encore à oublier que les lois doivent être au service des citoyens et non l’inverse. Parce que même les régimes les plus ignobles ont des lois : le régime hitlérien, l’apartheid, la colonisation, voire la traite des Noirs, étaient fondés sur des lois.
Au-delà des querelles autour du droit d’auteur, voilà la bombe que Tutu Muna – par irresponsabilité ou sous pression ? – a balancée sur ce qui reste de la nation. Et que vous avez accepté de cautionner!
Après qu’il eût résisté aux pogroms coloniaux et à deux dictatures, l’une maniaque et l’autre fainéante et bordélique, le peuple camerounais échappera-t-il au filicide auquel il est maintenant convié ?
Par Venant Mboua
Source : http://sissongho.over-blog.com
Cameroun: Fête de la jeunesse-La chronique de Mbombog Ntohol
lA CHRONIQUE DE MBOMBOG NTOHOL
Fête de la jeunesse au
Cameroun et assassinat de 6 jeunes Camerounais par les forces armées Marocaines, quel lien entre les deux évènements ?
Le 11 février prochain aura lieu la fête de la jeunesse camerounaise, ce moment de convivialité, de réflexion et d’échange entre les jeunes est endeuillé une fois de plus par l’assassinat de six jeunes camerounais par les forces de sécurité marocaine pour tentative d’entrée dans l’enclave espagnole de Melia située sur le territoire marocain.
Un tel acte par des jeunes est un acte de désespoir qui en dit long sur la situation de la jeunesse camerounaise aujourd’hui.
Une jeunesse abandonnée à elle-même sans réelle espoir. Le discours que le président devrait prononcer lundi ne citera certainement pas ces jeunes camerounais qui viennent rallonger la longue liste de tous ces camerounais jeunes moins jeunes mort en route en se rendent en Europe à la quête d’une vie meilleur en fuyant le pays qui leur a vu naître.
Sans se tromper on peut dire que le Cameroun a abandonné sa jeunesse, qui ne sait plus quelle direction prendre, malmenée par le chômage, et le sous-emploi.
Ce 11 février doit être celui d’une véritable prise de conscience définitive de tous les camerounais sans exception, car un pays qui sacrifie sa jeunesse est un pays sans avenir.
Le Cameroun a abandonné sa jeunesse donc le Cameroun ne peut pas être émergent même en l’an 2100.
Dans un pays normal où vivent des gens normaux qui pensent à l’avenir de leurs enfants, on prépare toujours une nouvelle génération pour prendre la relève de l’ancienne, au Cameroun c’est le contraire, la jeunesse est considérée comme l’ennemi numéro un et donc marginalisée, combattue et esclavagisée.
Tant que cette situation persiste il y aura aucun avenir pour la jeunesse camerounaise ou pour le Cameroun tout court, et la mort des 6 jeunes camerounais à la veille de cette fête nationale de la jeunesse camerounaise est un rappel si besoin est de son abandon par les occupants du pouvoir au Cameroun et l’opposition camerounaise.
A suivre……
Mbombog Ntohol
Le Cameroun, le seul pays Africain à vouloir signer sa recolonisation à travers...
Le Cameroun , le seul pays Africain à vouloir signer sa recolonisation à travers l’entourloupe proposée des accords de partenariats avec l’Union Européenne.
Lettre ouverte d’un spécialiste de la finance mondiale au président de la république pour son information, il ne pourra plus dire mon entourage est incompétent ou bien qu’il n’était pas au courant.
Eugène Nyambal
Eugène Nyambal: Lettre ouverte au Président de la République
M. le Président de la République,
Au moment où le destin de notre pays se décide dans les coulisses autour des négociations pour la ratification des Accords de Partenariat Economique (APE) avec l'Union européenne (UE), je
m'adresse à vous comme un patriote et avec l'humilité d'un fils du Cameroun pour vous suggérer de renoncer à ce «Traité Inégal». LAPE risque
en effet d'hypothéquer l'avenir de plusieurs générations de Camerounais et d'anéantir tout effort visant faire du Cameroun une société de stabilité et de prospérité.
Les enjeux autour de l'APE sont de taille. Sur le plan géostratégique, le monde est en pleine mutation et l'Afrique est considérée comme le prochain continent émergent compte tenu de l'abondance
de ses ressources naturelles et de sa croissance démographique. Ce potentiel est perçu par les partenaires de l'Afrique comme une opportunité à saisir pour alimenter leur, croissance et rester
dans la course pour l'hégémonie mondiale.
Incapable de remettre en cause son modèle de développement pour mieux affronter la compétition mondiale, l'Europe a décidé de «chasser en meute» pour capter les marchés africains et lier de
manière irréversible la destinée des deux continents avec les APE.
La ratification des APE représente une course solitaire et suicidaire pour le Cameroun
Les APE visent, rappelons-le, à instaurer une zone de libre-échange entre l'UE et les économies faiblement structurées des pays ACP à travers la suppression immédiate des droits de douane sur les
produits importés par l'UE auprès des pays ACP signataires (sauf pour le riz et le sucre) et une suppression progressive des droits de douane sur les produits importés par les pays ACP auprès de
l'UE. En contrepartie, l'UE s'engage à supprimer progressivement les subventions agricoles et à augmenter l'aide au développement pour soutenir la mise à niveau des infrastructures, du secteur
agro-alimentaire, de l'industrie ainsi que les réformes institutionnelles.
Permettez-moi, Mr. le Président, de relever un fait troublant: malgré les pressions de l'UE sur les ensembles sous régionaux (CEDEAO, CEMAC, SADC, ESA, Caraïbes et Pacifique), seule la région des
Caraïbes a signé un APE en 2007.
Dans la région Afrique centrale, seul le Cameroun a choisi d'ignorer les réticences de la société civile, de ses partenaires sous régionaux et de l'Association des industriels africains et a
conclu un accord intérimaire de partenariat avec l'UE en 2007. Celui-ci expire le 1er octobre 2014 et notre pays s'achemine visiblement vers la ratification d'un APE définitif qui impliquerait de
facto son application sur toute l'Afrique centrale.
Pour justifier cette ratification, on met en avant la volonté de promouvoir «l'économie la plus diversifiée de la sous-région», de favoriser l'émergence en 2035 et de garantir l'accès de nos
produits dans l'espace européen sans quotas ni droits de douane. Il s'agit notamment de la banane, de l'aluminium, des produits transformés du bois et des fruits et légumes d'une valeur totale
d'environ 200 milliards de francs CFA par an. En contrepartie, le Cameroun s'est engagé en 2008 à libéraliser 80% des importations en provenance de l'UE à partir de 2021. Mais selon plusieurs
experts nationaux, cette libéralisation pourrait coûter à l'Etat des pertes de l'ordre de 70% des recettes douanières, soit un total de 1300 milliards de francs CFA en 2023 et 2470 milliards en
2030 en sus du coût d'adaptation et de modernisation de l'économie camerounaise qui se situerait autour de 2500 milliards de francs CFA.
Pour inciter le Cameroun à ratifier cet accord, l'UE a mis en place un programme de mise à niveau des entreprises camerounaises à hauteur de 7 7 6,5 milliards de francs CFA en vue de les aider à
conquérir le marché européen dans la sidérurgie, la métallurgie, le textile, l'agro-alimentaire, le tourisme, le BTP, l'électronique, la mécanique, le cuir et la chaussure. Cependant, il s'agit
de secteurs dans lesquels notre pays ne dispose d'aucun atout pour s'imposer sur le marché domestique ou prendre des parts de marché en Europe compte tenu des contraintes de capacité et des
barrières non tarifaires.
La ratification des APE obligera le Cameroun à renouer avec les Pro
grammes d'Ajustement
Dans ces conditions, notre pays ne saurait s'engager dans l'aventurisme économique. Il devrait rejeter la ratification des APE pour les raisons suivantes:
L'expérience montre que les précédents accords préférentiels avec l'UE (Convention de Lomé en 1975. Accord de Cotonou en 2000 et «Tout sauf les Armes») n'ont pas permis d'enrayer le déclin de la
part des pays africains dans les importations de l'UE en raison de la faiblesse des capacités productives des pays ACP, de la persistance des subventions agricoles et des barrières non douanières
telles que les normes phytosanitaires.
Les APE interviennent en plus dans un contexte où la balance commerciale du Cameroun est structurellement déficitaire, où la croissance est tirée par le secteur pétrolier et les dépenses
publiques. Une ouverture réciproque des marchés pourrait détruire durablement notre tissu agricole et industriel au moment où il a besoin de la plus grande attention pour réaliser son potentiel.
Une concurrence frontale entre les producteurs camerounais et européens contribuant à la création d’emplois en Europe… et à la destruction d’emplois au Cameroun. Ce qui réduirait à néant les
objectifs des «grandes ambitions».
En raison de la baisse des recettes fiscales et du rétrécissement de la base productive, les APE réduiront aussi la capacité de l'Etat à générer des ressources propres pour financer son
fonctionnement et les investissements publics. Par conséquent, le gouvernement n'aura d'autre choix que de taxer davantage les contribuables et solliciter les financements du FMI et de l'UE. Ceci
entraînera une montée vertigineuse de l'endettement et le recours aux Programmes d'ajustement structurel (PAS). Un tel scénario réduirait nos marges de manœuvre pour diversifier l'économie et
faire face au défi de société que représente l'emploi des jeunes. Sommes-nous prêts, quelques années après l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative PPTE, à renouer avec les PAS après
l’expérience douloureuse des deux dernières décennies ayant entraîné la destruction du tissu économique et social du Cameroun?
Enfin, les APE pourraient porter un coup fatal à la dynamique d’intégration régionale.
Face à l’innovation des produits de l’UE et aux pertes de recettes fiscales occasionnées par le Cameroun, la réaction des autres pays membres de la CEMAC et de la CEEAC reste imprévisible.
Le libre-échangisme des APE est incompatible avec l'émergence
du Cameroun en 2035
Aucun pays n'est arrivé à l'émergence industrielle grâce au libre échangisme. Comme le montrent la crise des pays du Sud de l'Europe face à la locomotive allemande ainsi que l'incapacité de
l'Afrique à tirer profit de la Mondialisation, le libre-échange a pour conséquence la soumission des Etats les plus faibles au diktat des nations les plus avancées. En ce qui concerne le
Cameroun, compte tenu de l'accrochage du franc CFA à l'euro, la mise en place d'un accord de libre-échange avec l'Union Européenne équivaudrait à une entrée de facto de notre pays dans cet espace
économique au même titre que les DOM - TOM. Or, contrairement aux DOM-TOM et aux Etats les moins avancés de l'UE, le Cameroun ne bénéficiera ni des fonds structurels destinés à corriger les
déséquilibres de développement inter-étatiques, ni de la libre circulation de ses citoyens et de sa main-d’œuvre dans l'espace européen. Un tel revirement de notre part serait impardonnable face
au verdict de l'Histoire. Car il anéantirait les acquis des cinq dernières décennies ainsi que les sacrifices de nos martyrs.
L'expérience historique montre également que pour passer de la pauvreté de masse à l'émergence économique, les pays avancés ont mis en œuvre des politiques volontaristes destinées à promouvoir
les industries naissantes, qu'il s'agisse de l'Europe, des Etats Unis, du Japon, des Dragons asiatiques ou de I'lle-Maurice. Avant la révolution industrielle américaine, les Etats-Unis ont rejeté
avec force les propositions britanniques visant à instaurer le libre-échange entre les deux pays. Le Cameroun serait-il aujourd’hui mieux armé que les autres pays pour tirer profit du
libre-échange avec le plus grand bloc économique du monde? Pouvons-nous sacrifier l'avenir et l'ensemble de l'économie camerounaise pour protéger la banane de Njombe, l'aluminium d'Edéa et notre
bois aujourd'hui encore exporté sans valeur ajoutée significative — et exporté de surcroît par des entreprises étrangères installées au Cameroun?
Mr le Président, au moment où vous souhaitez accélérer la mise en œuvre des «grandes Ambitions s en vue de renforcer la croissance et la création d'emplois, le Cameroun ne saurait, dans une
course aussi solitaire que suicidaire, servir de «cheval de Troie» l'UE en Afrique centrale. Votre action ne saurait être associée, ni au sacrifice du bien-être et de l'avenir des populations des
sept pays membres de la CEEAC, ni encore moins au chômage de millions de jeunes. Malgré les relations historiques de nos partenaires européens, l'Afrique centrale demeure notre principal point
d'ancrage pour la prospérité. Nous ne saurions par conséquent, en temps de paix et en l'absence d'un traité de reddition condamner nos producteurs, nos familles et notre jeunesse à la pauvreté de
masse.
Nous n’avons pas le droit de transformer unilatéralement et durablement le Cameroun et l’Afrique centrale en une armée de consommateurs au bénéfice des entreprises installées en Europe et au
détriment de celles opérant dans le triangle national et la sous-région. Et compte tenu de la part insignifiante de l'aide de l'UE dans le budget national, nous n'avons pas l'obligation de signer
un accord en contradiction avec nos intérêts à long terme. Nous tous, simples citoyens camerounais, gouvernement, partis politiques et organisations de la société civile, avons par contre un
devoir: engager de toute urgence un débat vigoureux avant toute décision finale sur la ratification de l'APE.
Mr le Président, permettez-moi de vous suggérer, avec la plus grande humilité et au nom de la jeunesse camerounaise, de résister aux arguments visant à amener le Cameroun à ratifier les APE avec
l'Union européenne. Au besoin, toute la nation vous saurait gré d'organiser une consultation populaire par voie référendaire sur l'opportunité ou non d'une ratification de ce «Traité Inégal». Le
cas échéant, les représentants du peuple devront prendre leurs responsabilités face à l'Histoire, à leurs familles et aux citoyens camerounais. A mon humble avis, Monsieur le Président, c'est la
seule manière de préserver des marges de manœuvre pour l'avenir de notre pays.
Par Eugène Nyambal
Ex-conseiller principal de l'administrateur du Fmi pour l'Afrique
Source : Le jour
Jean Ping se réveille deux ans après son départ de l’Union Africaine et dénonce les assassins de Kadhafi, les présidents Africains qui baissent leur pantalon devant les Européens de ceux navig
Jean Ping se réveille deux ans après son départ de l’Union Africaine et dénonce les assassins de Kadhafi, les présidents Africains qui baissent leur pantalon devant les Européens de ceux naviguent dans le voyoutisme.
http://www.youtube.com/watch?v=wzGY3JdRbps
Un regard écologiste sur la République Centrafricaine : analyse du conflit et propositions de sortie de crise.
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Le 6 janvier 2014, quatre jours avant la démission du président centrafricain de transition Michel Djotodia, le groupe Afrique EELV s’est réuni afin « de comprendre la situation en RCA, d’envisager des solutions de sortie de crise à court et moyen terme, de discuter des initiatives envisageables dans ce cadre par EELV et par ses parlementaires, de sélectionner éventuellement les informations à transmettre au ministre délégué au Développement ».
Etaient présent/es une vingtaine de personnes dont, principaux intervenants de la réunion :
- Jean-Pierre Betindji,Franco-Centrafricain, pasteur, théologien, consultant pour le PNUD sur la RCA
- Victor Bissengue,Centrafricain, historien des pygmées Aka et principal animateur du site Sangonet.com
- Juan Branco,ancien collaborateur du Procureur de la CPI ayant travaillé entre autres sur l’affaire Jean-Pierre Bemba en RCA, reporter de guerre pour Les Inrockuptibles en RCA du 20 au 28 décembre 2013.
- François Passema, Centrafricain, ex-candidat à la présidentielle 1999 en RCA et candidat à la présidentielle à venir, président fondateur du Comité d’Action pour la Conquête de la Démocratie en Centrafrique (CACDCA), ancien collaborateur d’Abel Goumba, aujourd’hui responsable de la Formation du Syndicat des Cadres CGT de la Ville de Paris
- Claude Yabanda,Centrafricain, chef de cabinet du vice-président Abel Goumba entre 2003 et 2005, co-auteur en février 2013 de la Note de la Transnat’ EELV « Pour une résolution multilatérale du conflit en République Centrafricaine ».
La conversation s’est organisée pour l’essentiel autour de quatre points :
1. La dissolution historique de l’Etat en RCA
2. Les ressources naturelles au cœur du conflit
3. Quelle feuille de route en vue d’un processus de reconstruction de l’Etat en RCA ?
4. L’avenir politique de la RCA et ce que peut faire EELV
1. La dissolution historique de l’Etat en RCA
- Pour François Passema, la situation actuelle de dissolution de l’Etat centrafricain est la conséquence logique de la politique appliquée jusque dans les années 2000 par la France, ancienne puissance coloniale.
- Claude Yabanda revient sur l’histoire de la RCA. Le 29 mars 1959, la mort dans des conditions suspectes (accident d’avion) de Barthélémy Boganda scelle la mort de son projet d’« Etats-Unis de l’Afrique latine » = grosso modo regroupement des Etats actuellement membres de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC). En 1960, la République Centrafricaine devient indépendante seule, isolée aux confins de l’Afrique centrale francophone. Le projet de Barthélémy Boganda est à la fois égalitaire et ouvert sur les étrangers, qui ont toujours été nombreux en Oubangui-Chari. Sa devise : « Zo kwe zo » (« Un homme est un homme », i.e. tous les humains sont égaux et doivent être traités de la même manière) en sango, langue parlée par tou/tes les Centrafricain/es. Le programme de son parti fondé en 1949, le Mouvement pour l’évolution sociale de l’Afrique noire (MESAN) tient en 5 verbes définissant 5 besoins fondamentaux : Nourrir, Vêtir, Guérir, Instruire, Loger.
- François Passema reprend le fil des événements. Après la mort de Boganda, tous les présidents centrafricains vont peu ou prou être choisis par Paris : David Dacko (1960-1965 puis 1979-1981), Jean-Bedel Bokassa (1966-1979), André Kolimba (1981-1993), Ange-Félix Patassé (1993-2003), François Bozizé (2003-2012). L’élection présidentielle de 1993, qui voit la victoire d’Ange-Félix Patassé (ancien Premier ministre de Bokassa) devant Abel Goumba (ancien proche de Boganda) est frauduleuse, pilotée par la France. De même que la réélection de Patassé en 1999. En 2003, François Bozizé prend le pouvoir à la faveur d’un nouveau coup d’Etat.
Dès 2006, Bozizé doit faire face à une nouvelle rébellion venue du Nord, pilotée par Michel Djotodia. A partir de 2008-2009, l’Etat perd le contrôle de la quasi-totalité du pays, livré à diverses rébellions où les enfants soldats et les combattants étrangers, notamment venus du Tchad et du Soudan, sont nombreux. Les crimes de guerre sont quotidiens dans un pays où l’Etat et les services publics sont fantomatiques depuis la fin des années 1990. En 2008, Bozizé est obligé de concéder une partie du territoire, située à l’est du pays, à l’UFDR de Djotodia qui y exploite le diamant.
Le 10 décembre 2012, Djotodia rassemble différents mouvements rebelles du pays en une « alliance » Séléka composée de combattants centrafricains et tchadiens. Partie de la frontière tchadienne, bien armée et équipée, la Séléka arrive en quelques jours à Bangui et met en déroute une armée centrafricaine mal équipée et démotivée. La Séléka ne fait pas de prisonniers. Toutes les localités conquises sont pillées, le butin repart en 4×4 à destination du Tchad et du Soudan.
Le 24 mars 2013, Bozizé s’enfuit et Djotodia est porté au pouvoir par la Séléka.
Le 5 décembre 2013, l’intervention française « Sangaris » est décidée face à une situation de décomposition quasi-totale de l’Etat et d’insécurité maximale, avec des centaines de milliers de Centrafricain/es réfugié/es en brousse ou en forêt. Les violences à l’intérieur du pays ont aussi attiré des centaines des milliers de civil/es vers Bangui, ville où près de la moitié de la population est aujourd’hui étrangère. Parmi eux, des Tchadiens, Soudanais ou Africains musulmans issus de pays francophones qui ont dû se replier devant l’avance des milices d’auto-défense « Anti-Balakas » qui, de mieux en mieux organisées, ripostent à l’avance de la Séléka. Les 1600 militaires français sont membres de la Mission Internationale de Soutien à la Centrafrique sous conduite Africaine (MISCA), force onusienne de 4500 soldats majoritairement issus d’Afrique centrale.
Barthélémy Boganda
2. Les ressources naturelles au cœur du conflit
- Il y a un consensus entre les 5 principaux intervenants pour dire que par-delà les aspects communautaires, régionaux ou religieux, ce qui est en jeu aujourd’hui est principalement la répartition des ressources naturelles centrafricaines (pétrole au Nord ; uranium au centre ; diamant + or à l’Est ; forêt dont le sous-sol est également très riche en minéraux à peu près partout ; eau enfin des fleuves Oubangi, Chari et Uélé, convoitée par le Tchad et par le Soudan) entre les grandes puissances économiques du monde (France, Etats-Unis, Chine, Russie qui essaye de s’inviter…) et les pays africains voisins. Ce partage des ressources d’un Etat extrêmement affaibli est en cours de négociation et il n’est pas encore arrêté. Les garants et intermédiaires centrafricains de cette répartition n’ont pas encore été définitivement choisis. C’est pour cette raison, principalement, que la situation reste très instable. Les combats à Bangui sont d’ailleurs illisibles : il y a des tirs au sein d’un même camp entre différentes mouvances de la Séléka, entre différentes composantes nationales de la Misca.
(à ce sujet, voir cette intéressante cartographie du Monde)
- Il y a également consensus entre ces 5 intervenants pour dire que l’information est extrêmement lacunaire en-dehors de Bangui : on ne sait pas ce qui se passe dans les villages éloignés et, vu les horreurs constatées de visu à moins de 100 km de Bangui, il faut s’attendre au pire.
- Les 4 intervenants centrafricains estiment qu’il y a eu de la part de la Séléka une politique d’une part de terreur de façon à faire fuir des habitant/es installé/es de longue date dans certaines régions, d’autre part de destruction systématique des archives administratives non musulmanes du pays. Et ce, dans un but déterminé : effacer de la mémoire écrite qui est qui afin qu’au moment de l’établissement des listes électorales, toute personne présente sur le territoire même depuis récemment puisse être considérée comme Centrafricain – il s’agit donc d’une politique délibérée de remplacement d’une population par une autre. Sous l’influence notamment des pays de la péninsule arabique, une politique d’islamisation serait à l’œuvre en RCA, y compris sur le plan éducatif et linguistique (l’arabe se développant à côté du français, comme au Tchad ces vingt dernières années), profitant de l’absence d’Etat. Les combattants djihadistes étrangers venus de ces pays mais aussi du Pakistan ou d’Afghanistan, sont d’ailleurs nombreux aux côtés de la Séléka.
- Juan Branco apporte un « très fort bémol » à cette vision, estimant pour sa part que la Séléka ne porte pas véritablement un projet d’islamisation du territoire – Michel Djotodia est d’ailleurs de formation marxiste -, mais que les Anti-Balakas ont quant à eux un discours et des actes très fortement essentialistes à l’encontre des musulmans. Toutefois, il convient avec les 4 autres intervenants que l’Etat centrafricain est aujourd’hui à peu près totalement dissous : il a lui-même constaté que même les principaux ministères (Education nationale, Justice…) ne fonctionnent plus, tandis que la prison centrale de Bangui est aujourd’hui ouverte… ce qui génère une violence criminelle assez permanente, peut-être plus importante même que la violence politique aujourd’hui à Bangui. Il confirme également que la Séléka est désormais contrôlée militairement non plus par Djotodia mais par Noureddine Adam, un Centrafricain musulman du Nord qui a longtemps vécu au Soudan, en Egypte et aux Emirats arabes unis.
Exploitation artisanale du diamant en République Centrafricaine
3. Quelle feuille de route en vue d’un processus de reconstruction de l’Etat en RCA ?
- François Passema voit, dans l’immédiat, un processus en 4 temps :
1. Déploiement d’une force internationale de maintien de la paix d’au moins 12 500 hommes (au moins 500 dans chacune des 16 préfectures de la RCA), tous correctement payés, nourris et équipés (ce qui n’est pas souvent le cas des forces africaines de maintien de la paix) – compte tenu des accusations de partialité dont il fait l’objet, le Tchad ne devra pas être un contributeur essentiel à cette force.
2. Désarmement de la population (car c’est presque toute la population qui est aujourd’hui armée en RCA) et expulsion des combattants étrangers de la Séléka, notamment vers le Tchad et le Soudan.
3. Retour des fonctionnaires dans les administrations et des ONG sur l’ensemble du terrain.
4. Début du recensement électoral.
Ce processus est impossible en moins d’un an.
Les élections sont nécessaires, mais elles ne sont pas la finalité d’un processus de réconciliation dont le premier objectif, au-delà bien sûr de la paix et de la sécurité, doit être la reconstitution d’un Etat fonctionnel.
- Victor Bissengue insiste sur le fait que sans désarmement, il n’y a pas de recensement électoral possible.
- Claude Yabanda rappelle qu’un million de Centrafricain/es (sur une population totale de 5 millions) ont été déplacé/es par le conflit, une grande partie d’entre eux s’est réfugiée en forêt. Ils ne retourneront pas chez eux sans le désarmement, ce qui rend évidemment tout recensement électoral illusoire avant le désarmement.
Soldats de la MISCA ET LES CHARS FRANCAIS
(source : http://rpdefense.over-blog.com/)
4. L’avenir politique de la RCA et ce que peut faire EELV
- François Passema, Claude Yabanda et Jean-Pierre Betindji constatent que l’ensemble de la classe politique centrafricaine est discréditée auprès des Centrafricain/es. Une grande méfiance est notamment perceptible à l’égard des anciens Premiers ministres d’Ange-Félix Patassé qui essaient aujourd’hui de se faire bien voir à Paris auprès des grandes formations politiques françaises.
- Claude Yabanda insiste sur la nécessité de respecter la Charte constitutionnelle de la transition promulguée le 18 juillet 2013 : il en va de la crédibilité des institutions, qui ont besoin d’être restaurées en RCA. Le cadre de cette Charte, qui prévoit des élections présidentielles en février 2015 après l’établissement d’un fichier électoral entre février et novembre 2014, permet aussi de se donner le temps :
1) de faire émerger, en RCA ou dans la diaspora, des figures politiques qui ne se sont pas
discréditées en participant de trop près aux divers régimes Dacko, Bokassa, Patassé, Bozizé… qui ont tous conduit le pays à sa désintégration actuelle ;
2) de réunir les fonds internationaux pour des enjeux aussi considérables que le désarmement de la population ou le retour d’un million de déplacés ;
3) d’organiser une grande conférence internationale sur la reconstruction de la RCA, où les pays riches qui en exploitent les ressources naturelles s’engageraient en contrepartie à financer
écoles, hôpitaux, infrastructures… et formation des habitant/es pour le bon fonctionnement et la maintenance de ces équipements – cette conférence pourrait être une initiative de la France, via
notamment son ministre délégué au Développement.
- Jean-Pierre Betindji estime également qu’au-delà de la réconciliation nationale, le principal enjeu qui attend la RCA demain est la négociation des relations que le pays veut avoir avec ses voisins et avec les pays riches qui viennent exploiter ses ressources naturelles. La RCA doit se donner les moyens d’un partenariat crédible avec chacun de ces pays.
- François Passema en est d’accord. Interrogé par le groupe Afrique EELV sur la dimension écologique de son projet pour la RCA, il envisage la création d’un grand ministère de l’Aménagement du territoire qui aurait notamment pour responsabilité de définir les conditions légales d’une exploitation durable des ressources naturelles. Cette définition servirait de base pour les négociations entre l’Etat centrafricain et les multinationales du secteur extractif. Elle aurait pour finalité de garantir aux générations futures des Centrafricain/es la jouissance de leurs ressources naturelles nationales.
Forêt dans la région de la Lobaye (République Centrafricaine)
Source : Europe Ecologie les verts
Tchad : combien de temps la population restera-t-elle otage du pire dictateur de la Françafrique ?
Tchad : combien de temps la population restera-t-elle otage du pire dictateur de la Françafrique ?
Idriss Déby Chef de guerre
Applaudi à Bamako aux côtés de Hollande, Idriss Déby vient d’obtenir un siège de membre non permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU : le dictateur tchadien sort très renforcé de la guerre au Mali. La lutte contre le ‘djihadisme’ au Sahel est passée par l’alliance de l’armée française avec les troupes claniques d’un chef d’Etat considéré comme l’un des pires dictateurs d’Afrique. Idriss Déby en profite pour se présenter désormais comme rempart contre le terrorisme islamique ou comme sous-traitant potentiel d’opérations militaires ou de maintien de la paix.
L’argent du pétrolea permis le renforcement rapide de l’armée tchadienne depuis 2003, sans que la rente ne profite à la population, même si des infrastructures sortent de terre. Selon International Crisis Group en 2009 [1], « les ressources pétrolières sont devenues pour le pouvoir tchadien une source de renforcement militaire, de clientélisme et de cooptation politiques. Cette situation contribue à verrouiller davantage l’espace politique national et à maintenir le pays dans un blocage persistant qui radicalise des antagonismes entre le pouvoir et ses opposants. » Le pétro-Etat est 184e sur 186 au classement de l’indice de développement humain du PNUD [2]. Le gouvernement tchadien a annoncé le triplement de sa production pétrolière en 2015, ce qui le placerait au niveau du Congo-Brazzaville [3]. Récemment, il a décidé la création d’un fond d’investissement de 50Mds de dollars avec l’aide de Samuel Maréchal, ancien dirigeant du Front National [4]. Cette manne permet à Déby de financer des activités politiques en Afrique à la manière de Khadafi. Il intimide d’autres présidents, en particulier en Afrique de l’Ouest, et fragilise ainsi la démocratie, là où elle commence à s’installer.
Durant l’intervention au Mali, en mai 2013, Idriss Déby a pu écraser le peu d’opposition encore debout sans grande réaction internationale [5]. Cependant, la répression au Tchad en 2013 ou la présence des derniers enfants soldats tchadiens ne sont qu’une infime partie du bilan de 23 ans de règne : la liste des massacres perpétrés par les 10 000 ‘soudards’ de la Garde Républicaine, des exécutions extra-judiciaires, des exécutions d’opposants, des villages brûlés, des prisonniers torturés ou exécutés, est interminable. Un inventaire des crimes est impossible à dresser car les organisations de droits humains n’ont la possibilité d’enquêter que très partiellement au Tchad. Déby a évidemment garanti l’impunité aux exécutants de ses ordres. Il a tout autant l’habitude d’emprisonner ou d’expulser des opposants que de corrompre des journalistes, des militants des droits humains, des politiciens, selon ses besoins, dans son pays et ailleurs.
La majorité des massacres a eu lieu dans les années 90 et sont liés à des guerres contre des rébellions, qui se sont créées en réaction aux massacres précédents, au caractère ethnique de l’armée, puis à l’accaparement des recettes pétrolières par la famille présidentielle et à l’impossibilité d’alternance politique. Une partie des crimes sont des crimes contre l’humanité imprescriptibles. La justice internationale s’est construite dans les années 2000, et Idriss Déby, très soutenu par Chirac jusqu’en 2007, s’est adapté pour éviter d’être poursuivi par la CPI comme l’a été le président soudanais El Béchir [6]. En 1990, la Commission d’enquête nationale avait établi à 40 000 le nombre de victimes du régime Habré. Dès 1993, Amnesty alertait sur la continuité des méthodes des deux régimes [7]. L’impunité de Déby rejoint celle de Habré d’autant plus que, comme Commandant en chef des Forces Armées du Nord, puis conseiller à la sécurité à la présidence jusqu’à sa défection en 1989, il a mené une partie des massacres attribués à Habré, dont ceux du ‘Septembre noir’ en 1984 dans le Sud, et ceux de la région de Guéra dans la répression du MOSANAT entre 1986 et 1988. Idriss Déby a déjà négocié son immunité au procès de Habré aux Chambres Africaines au Sénégal, où il est prévu qu’il intervienne comme témoin [8].
L’armée française a depuis 1990 été aux premières loges pour observer les crimes d’Idriss Déby et pour le protéger. En février 1998, à Sahr dans le Sud du Tchad, après l’enlèvement de 4 français par Mahamout Nahor, des massacres ont été commis sur ordre de Déby avec des soldats français à proximité. Concernant l’assassinat en février 2008 du leader de l’opposition démocratique Ibni Oumar Mahamat Saleh, l’enquête de la juge d’instruction française Emmanuelle Ducos permettra peut-être de connaître les témoignages des deux conseillers français présents et en particulier celui du colonel Gadoullet [9]. L’armée française a maintenu sa collaboration alors que les crimes s’accumulaient, cautionnant ainsi l’impunité, et contribuant ainsi à une banalisation des crimes contre l’humanité. Cette collaboration a aidé Déby à rester au pouvoir, jusqu’aux deux interventions françaises pour le sauver en 2006 et 2008. Par ailleurs, et de façon positive, pour pallier les défaillances de l’Etat tchadien, l’armée française joue un rôle humanitaire et social, grâce à l’hôpital militaire Epervier, ou en intervenant en cas d’incendies ou de catastrophes naturelles [10].
Idriss Déby n’a aucune légitimité démocratique. Il est arrivé par les armes. Il a été installé durablement en 1996 par les experts en fraude électorale français à l’époque où la Françafrique pouvait tout se permettre [11]. Il n’a eu ensuite qu’à profiter de l’expérience des dictateurs en scrutins frauduleux et à écraser toute opposition. La dernière mascarade, en 2011, cautionnée par l’Union Européenne suite au travail de l’expert des élections en dictature, Louis Michel, n’a apporté aucun progrès.
La démocratisation de l’Afrique centrale est actuellement impossible. Les destins du Tchad, de la Centrafrique, du Cameroun, du Congo Brazzaville et du Gabon sont liés. Les dictateurs sont globalement solidaires. Cette situation bloquée est aussi le résultat de l’historique de la politique française dans la région qui a favorisé son approvisionnement en pétrole. Actuellement, l’Union européenne qui souhaiterait commencer à définir sa politique de défense au Conseil européen de décembre, est entraînée par la politique française sous influence militaire dans des alliances avec les dictateurs de la Françafrique. La démocratisation est sacrifiée au profit du renforcement de la sécurité européenne et de son industrie d’armement. Le gouvernement français tente de (re)faire croire que les présidents peuvent construire « la paix et la stabilité » sans considération pour la nature des régimes. Les peuples, privés d’élections crédibles, sont toujours exclus du débat sur leur sécurité. Ainsi, Déby, qui a regagné une certaine ‘légitimité internationale’, se renforce militairement à l’extérieur et a réussi à s’imposer comme acteur incontournable en Centrafrique qu’il avait lui-même déstabilisée [12].
Le 29 octobre 2013, le Tchad subira l’Examen Périodique Universel de l’ONU à Genève [13]. Cet examen, non directement contraignant, permettra de juger de l’avancement de la construction de l’Etat de droit. Idriss Déby, mis en cause et susceptible d’avoir à rendre des comptes, ne fait évoluer son régime que très lentement. Les recommandations pour l’EPU formulées par Amnesty révèlent la nature du régime et l’horreur paralysante que vit la population depuis 23 ans [14]. Même si l’EPU ne vise pas directement à la justice et la vérité pour l’ensemble des crimes du régime tchadien, la mise en œuvre rapide de ses recommandations est essentielle.
Le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique invite le gouvernement
français à modifier impérativement sa politique au Tchad dans le sens :
d’un arrêt du soutien diplomatique et militaire à Idriss Déby,
d’un soutien actif aux démocrates tchadiens, et à la construction de l’Etat de droit selon les recommandations de l’Examen Périodique Universel
d’un retrait des troupes françaises du Tchad
à l’occasion du procès Habré, d’une transparence sur l’ensemble des crimes observés par des fonctionnaires français au Tchad entre 1982 et 2013, y compris sur les victimes des
événements de février 2008 dont Ibni Oumar Mahamat Saleh.
19 signataires : Forces Vives tchadiennes en exil, Rassemblement National Républicain (RNR, Tchad), Union des Populations du Cameroun (UPC), Comité d’Action pour la Conquête de la Démocratie en Centrafrique (CACDCA), Fédération des Congolais de la Diaspora (Congo Brazzaville), Mouvement pour le Renouveau Démocratique (MRD, Djibouti, coalition Union pour le Salut National (USN)), Alliance Républicaine pour le Développement (ARD, Djibouti, coalition Union pour le Salut National (USN)), Ca suffit comme cà ! (Gabon), Mouvement pour la Restauration Démocratique en Guinée Equatoriale (MRD), Forum Citoyenneté Monde arabe (FCMA), Amicale panafricaine, Plateforme Panafricaine, Sortir du Colonialisme, Afriques en lutte, Parti Communiste Français (PCF), Parti de Gauche, Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique (FASE), Europe Ecologie les Verts.
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English version
Chad : How much longer will the population be kept hostage by the worst dictator in Françafrique ?
The subject of applause when he stands beside François Hollande in Bamako, Idriss Déby the Chadian dictator has just won a seat as a non-permanent member of the United Nations Security Council : the Chadian dictator’s position has been very strongly reinforced by the war in Mali. The fight against “Jihadism” in the Sahel desert was waged by an alliance between the French army and clan troops of a head of state considered one of the worst dictators in Africa. As a result of that alliance, Idriss Déby is now positioning himself as a bulwark against Islamist terrorism in Africa or a potential sub-contractor for military and peacekeeping operations.
Money from oil has enabled the rapid strengthening of the Chadian army since 2003, without any of the profits from oil benefiting the population, even if some infrastructure is beginning to appear above ground. According to the International Crisis Group in 2009, “…oil has become a means for the regime to strengthen its armed forces, reward its cronies and co-opt members of the political class. This has further limited the political space available to the opposition and has helped keep the country in a state of political paralysis which stokes the antagonism between the regime and its opponents.” [1] The petro-state is ranked 184th out of 186 in the UNDP’s Human Development Index [2]. The Chadian government has announced a tripling of its oil production by 2015, which would place it at the same level as Congo-Brazzaville [3] . Recently, it decided to create an investment fund of $50 billion with the help of Samuel Maréchal, a former senior member of the French National Front [4]. This windfall allows Déby to finance his political activities, Gaddafi-style, in Africa. He intimidates other presidents, particularly in West Africa, and in this way he undermines democracy wherever it begins to take root.
During the intervention in Mali in May 2013, Idriss Déby was allowed to crush what little opposition still existed in Chad, with very little international response [5]. However, the repression in Chad in 2013, or even the presence of the remaining Chadian child soldiers, constitute only a very small part of the record of Déby’s 23 year reign : the massacres perpetrated by the ten thousand brutish soldiers of the Republican Guard, the extrajudicial executions, the executions of opponents, the villages burnt to the ground, the tortured or executed prisoners, the list is endless. A full inventory of the crimes committed is impossible to compile because human rights organizations have only partial powers of investigation in Chad. Déby has clearly guaranteed impunity to the people who carry out his orders. He is just as much in the habit of imprisoning or expelling his opponents, as he is in corrupting journalists, human rights activists and politicians, wherever he has a need, either in Chad itself or elsewhere.
The majority of the massacres took place in the 90s and were related to internal wars against uprisings which initially resulted from his previous massacres and the ethnic makeup of the army, and then were provoked by the grabbing of oil revenues by the presidential family and the impossibility of political change. Some of his crimes are crimes against humanity and are not subject to a statute of limitations. The international criminal justice system was developed in the early 2000s. Idriss Déby strongly supported by Jacques Chirac until 2007, has adapted his behavior to avoid prosecution by the International Criminal Court similar to what has happened to Sudanese President al-Bashir [6]. In 1990, the National Commission of Inquiry established that Habré’s victims numbered 40,000. As early as 1993, Amnesty Internatioal warned about the continuity of methods between the regimes of Habré and Déby [7]. Déby has inherited Habré’s immunity ; especially since, as Commander in Chief of the Northern Armed Forces and security adviser to president Habré until his defection in 1989, he led some of the massacres attributed to Habré, including those of ‘Black September’ in 1984 in the South, and, the putting down of the MOSANAT rebel movement between 1986 and 1988 in the Guéra region. With regard to Habré’s trial, Idriss Déby has already negotiated his immunity with the Extraordinary African Chambers in the courts of Senegal, where he is expected to testify against Habré [8].
Since 1990 the French army has not only had a front row seat in the observation of Idriss Déby’s crimes, but also in protecting him. In February 1998, at Sahr in southern Chad, after the kidnapping of four French people by Mahamout Nahor, massacres were committed on Déby’s orders with French soldiers nearby. With regard to the assassination in February 2008 of Ibni Oumar Mahamat Saleh, the leader of the democratic opposition, the French judge who led the investigation, Emmanuel Ducos, may well know the versions of the two French military advisors who were present, in particular that of Colonel Gadoullet [9]. As Habrés crimes have increased in number, the French army has continued to cooperate with him, thus comforting his impunity and contributing to a trivialization of his crimes against humanity. This collaboration has helped Déby to stay in power. France has even gone so far as to save him twice through military intervention, in 2006 and 2008. In addition, to overcome the shortcomings of the Chadian government, the French army has played a positive humanitarian and social role with its “Epervier” military hospital, or when it helps in cases of fire or natural disaster [10].
Idriss Déby has no democratic legitimacy. He arrived by force of arms. He was installed permanently in 1996 by French experts in electoral fraud at a time when Françafrique could do anything it wanted [11]. Since then he has learnt profitably from the experience built up by fellow dictators in the practice of fraudulent elections and crushing of all opposition. The last masquerade, endorsed by the European Union in 2011 following the labors of Louis Michel, the expert on how to hold elections in dictatorships, has brought no progress.
The democratization of Central Africa is currently impossible. The fates of Chad, the Central African Republic, Cameroon, Congo Brazzaville and Gabon are linked. Dictators are generally supportive of each other. This blocked state of affairs is also the result of the policy France has historically followed in the region to ensure its own supply of oil. At the moment, the European Union, which would like to start work on the defense policy it intends to present to the European Council in December, is driven by French politics, under military influence, in its alliances with the dictators of Françafrique. Democratization has been sacrificed in favor of strengthening European security and its arms industry. The French government is trying to make believe (once again) that presidents can build “peace and stability” without taking into account the nature of their regimes. The populations of these countries, deprived of credible elections, are still excluded from the debate about their own security. As a result of regaining a little “international legitimacy” Déby has both increased his external military strength and has managed to establish himself as the key player in the Central African Republic he himself destabilized [12].
On 29 October 2013, Chad will undergo the Universal Periodic Review (UPR) of the UN in Geneva [13]. This review, which is not directly binding, will evaluate what progress has been made in the establishment of the rule of law in Chad. Idriss Déby, even when accused directly, and liable to be held responsible, only lets his regime change very slowly. The recommendations made to the UPR by Amnesty International reveal the true nature of the regime and the paralyzing horror that the population has lived through for the last 23 years [14]. Although the UPR does not ask directly for truth and justice for all the crimes committed by the Chadian regime the rapid implementation of its recommendations is essential.
The Collective for Solidarity with Social and Political Struggles in Africa
calls on the French government to urgently change its policy towards Chad by : Halting
its diplomatic and military support to Idriss Déby
Providing active support to Chadian Democrats, and the establishment of the rule
of law according to the recommendations of the Universal Periodic Review
Withdrawal of French troops from Chad
On the
occasion of the Habré trial, providing total transparency with regard to all crimes reported by French officials in Chad between 1982 and 2013, with details of the victims of the events of
February 2008 including those of Ibni Oumar Mahamat Saleh.
Collective for Solidarity with Social and Political Struggles in Africa
Notes
1. 26 Aug 2009, International Crisis Group : Chad : Escaping from the Oil Trap, http://www.crisisgroup.org/en/regio…
2.
28 March 2013, International Human Development Indicators, http://hdrstats.undp.org/en/countri…
3. 29 september 2013,
Pétrole : le Tchad va tripler sa production, http://financialafrik.com/2013/09/2…
4. 02 October 2013, M&A finance s’active au Tchad, http://africaintelligence.fr/LC-/ho…
5.
09 May 2013, updated 07 June 2013, FIDH, LTDH, APTDH : Chad : Crackdown on a background of militarytensions, http://fidh.org/en/africa/Chad/chad…
6.
2 september 2008, U.N. “Human rights situations that require the Council’s attention : Report of the Special Rapporteur on the situation of human rights in the Sudan :
http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UN…
7.
21 April 1993, CHAD, Amnesty international calls for a full inquiry into army killings in the south in 1993, http://www.amnesty.org/fr/library/a…
8.
30 September 2013, Jean Bernard Padaré : l’avocat qui construit scientifiquement la perte d’Idriss Déby ITNO—Jean-Bernard Padaré, the lawyer who is bringing about the scientific loss of
Idriss Déby ITNO”, http://www.ndjamena-matin.com/artic…
9. Septembre 2009,
Amnesty : « Disparitions forcées au Tchad—Enforced Disappearances in Chad » : amnesty.fr/sites/default/files/SF09MA084_tchad.pdf, + Amnesty International Report 2009,
Chad : Enforced Disappearances, http://www.amnesty.org/en/region/ch…, + 5 March 2013, Survie : Déby redevient
fréquentable, l’impunité de ses crimes demeure, survie.org/billets-d-afrique/2013/221-fevrier-2013/article/deby-redevient-frequentable-l
10. 28 July 2011, Vers une redéfinition de la présence militaire française au Tchad ?—Towards a redesign of the French Military Presence in
Chad ?” : http://www.france24.com/fr/20110728…
11. Jerôme Grand d’Esnon and André Rouge, Verschave, Noir Chirac, 2002, p225 chap. “Légitimer le frère Déby, bourreau des Tchadiens – Legitimizing brother Déby,
Executioner of the Chadians”
12. On 23 & 24 March 2013, the Chadian special forces clandestinely fought against the
Central African army and South African soldiers of the FOMAC peacekeeping mission to create an opening in their lines through which the Séléka was allowed to enter Bangui, 8 October 2013,
AFP : “La Centrafrique, une affaire de sécurité nationale pour N’Djamena” : http://liberation.fr/monde/2013/10/…
13.
29 October 2013, Chad Universal Periodic Review, U.N. Geneva, http://www.upr-info.org/-Chad-.html
14.
31 July 2013, “Suggested recommendations to States considered in the 17th round of the Universal Periodic Review, 21 October-1 November, 2013”, http://amnesty.org/en/library/asset…
Applaudi à Bamako aux côtés de Hollande, Idriss Déby vient d’obtenir un siège de membre non permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU : le dictateur tchadien sort très renforcé de la guerre au Mali. La lutte contre le ‘djihadisme’ au Sahel est passée par l’alliance de l’armée française avec les troupes claniques d’un chef d’Etat considéré comme l’un des pires dictateurs d’Afrique. Idriss Déby en profite pour se présenter désormais comme rempart contre le terrorisme islamique ou comme sous-traitant potentiel d’opérations militaires ou de maintien de la paix.
L’argent du pétrolea permis le renforcement rapide de l’armée tchadienne depuis 2003, sans que la rente ne profite à la population, même si des infrastructures sortent de terre. Selon International Crisis Group en 2009 [1], « les ressources pétrolières sont devenues pour le pouvoir tchadien une source de renforcement militaire, de clientélisme et de cooptation politiques. Cette situation contribue à verrouiller davantage l’espace politique national et à maintenir le pays dans un blocage persistant qui radicalise des antagonismes entre le pouvoir et ses opposants. » Le pétro-Etat est 184e sur 186 au classement de l’indice de développement humain du PNUD [2]. Le gouvernement tchadien a annoncé le triplement de sa production pétrolière en 2015, ce qui le placerait au niveau du Congo-Brazzaville [3]. Récemment, il a décidé la création d’un fond d’investissement de 50Mds de dollars avec l’aide de Samuel Maréchal, ancien dirigeant du Front National [4]. Cette manne permet à Déby de financer des activités politiques en Afrique à la manière de Khadafi. Il intimide d’autres présidents, en particulier en Afrique de l’Ouest, et fragilise ainsi la démocratie, là où elle commence à s’installer.
Durant l’intervention au Mali, en mai 2013, Idriss Déby a pu écraser le peu d’opposition encore debout sans grande réaction internationale [5]. Cependant, la répression au Tchad en 2013 ou la présence des derniers enfants soldats tchadiens ne sont qu’une infime partie du bilan de 23 ans de règne : la liste des massacres perpétrés par les 10 000 ‘soudards’ de la Garde Républicaine, des exécutions extra-judiciaires, des exécutions d’opposants, des villages brûlés, des prisonniers torturés ou exécutés, est interminable. Un inventaire des crimes est impossible à dresser car les organisations de droits humains n’ont la possibilité d’enquêter que très partiellement au Tchad. Déby a évidemment garanti l’impunité aux exécutants de ses ordres. Il a tout autant l’habitude d’emprisonner ou d’expulser des opposants que de corrompre des journalistes, des militants des droits humains, des politiciens, selon ses besoins, dans son pays et ailleurs.
La majorité des massacres a eu lieu dans les années 90 et sont liés à des guerres contre des rébellions, qui se sont créées en réaction aux massacres précédents, au caractère ethnique de l’armée, puis à l’accaparement des recettes pétrolières par la famille présidentielle et à l’impossibilité d’alternance politique. Une partie des crimes sont des crimes contre l’humanité imprescriptibles. La justice internationale s’est construite dans les années 2000, et Idriss Déby, très soutenu par Chirac jusqu’en 2007, s’est adapté pour éviter d’être poursuivi par la CPI comme l’a été le président soudanais El Béchir [6]. En 1990, la Commission d’enquête nationale avait établi à 40 000 le nombre de victimes du régime Habré. Dès 1993, Amnesty alertait sur la continuité des méthodes des deux régimes [7]. L’impunité de Déby rejoint celle de Habré d’autant plus que, comme Commandant en chef des Forces Armées du Nord, puis conseiller à la sécurité à la présidence jusqu’à sa défection en 1989, il a mené une partie des massacres attribués à Habré, dont ceux du ‘Septembre noir’ en 1984 dans le Sud, et ceux de la région de Guéra dans la répression du MOSANAT entre 1986 et 1988. Idriss Déby a déjà négocié son immunité au procès de Habré aux Chambres Africaines au Sénégal, où il est prévu qu’il intervienne comme témoin [8].
L’armée française a depuis 1990 été aux premières loges pour observer les crimes d’Idriss Déby et pour le protéger. En février 1998, à Sahr dans le Sud du Tchad, après l’enlèvement de 4 français par Mahamout Nahor, des massacres ont été commis sur ordre de Déby avec des soldats français à proximité. Concernant l’assassinat en février 2008 du leader de l’opposition démocratique Ibni Oumar Mahamat Saleh, l’enquête de la juge d’instruction française Emmanuelle Ducos permettra peut-être de connaître les témoignages des deux conseillers français présents et en particulier celui du colonel Gadoullet [9]. L’armée française a maintenu sa collaboration alors que les crimes s’accumulaient, cautionnant ainsi l’impunité, et contribuant ainsi à une banalisation des crimes contre l’humanité. Cette collaboration a aidé Déby à rester au pouvoir, jusqu’aux deux interventions françaises pour le sauver en 2006 et 2008. Par ailleurs, et de façon positive, pour pallier les défaillances de l’Etat tchadien, l’armée française joue un rôle humanitaire et social, grâce à l’hôpital militaire Epervier, ou en intervenant en cas d’incendies ou de catastrophes naturelles [10].
Idriss Déby n’a aucune légitimité démocratique. Il est arrivé par les armes. Il a été installé durablement en 1996 par les experts en fraude électorale français à l’époque où la Françafrique pouvait tout se permettre [11]. Il n’a eu ensuite qu’à profiter de l’expérience des dictateurs en scrutins frauduleux et à écraser toute opposition. La dernière mascarade, en 2011, cautionnée par l’Union Européenne suite au travail de l’expert des élections en dictature, Louis Michel, n’a apporté aucun progrès.
La démocratisation de l’Afrique centrale est actuellement impossible. Les destins du Tchad, de la Centrafrique, du Cameroun, du Congo Brazzaville et du Gabon sont liés. Les dictateurs sont globalement solidaires. Cette situation bloquée est aussi le résultat de l’historique de la politique française dans la région qui a favorisé son approvisionnement en pétrole. Actuellement, l’Union européenne qui souhaiterait commencer à définir sa politique de défense au Conseil européen de décembre, est entraînée par la politique française sous influence militaire dans des alliances avec les dictateurs de la Françafrique. La démocratisation est sacrifiée au profit du renforcement de la sécurité européenne et de son industrie d’armement. Le gouvernement français tente de (re)faire croire que les présidents peuvent construire « la paix et la stabilité » sans considération pour la nature des régimes. Les peuples, privés d’élections crédibles, sont toujours exclus du débat sur leur sécurité. Ainsi, Déby, qui a regagné une certaine ‘légitimité internationale’, se renforce militairement à l’extérieur et a réussi à s’imposer comme acteur incontournable en Centrafrique qu’il avait lui-même déstabilisée [12].
Le 29 octobre 2013, le Tchad subira l’Examen Périodique Universel de l’ONU à Genève [13]. Cet examen, non directement contraignant, permettra de juger de l’avancement de la construction de l’Etat de droit. Idriss Déby, mis en cause et susceptible d’avoir à rendre des comptes, ne fait évoluer son régime que très lentement. Les recommandations pour l’EPU formulées par Amnesty révèlent la nature du régime et l’horreur paralysante que vit la population depuis 23 ans [14]. Même si l’EPU ne vise pas directement à la justice et la vérité pour l’ensemble des crimes du régime tchadien, la mise en œuvre rapide de ses recommandations est essentielle.
Le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique invite le gouvernement
français à modifier impérativement sa politique au Tchad dans le sens :
d’un arrêt du soutien diplomatique et militaire à Idriss Déby,
d’un soutien actif aux démocrates tchadiens, et à la construction de l’Etat de droit selon les recommandations de l’Examen Périodique Universel
d’un retrait des troupes françaises du Tchad
à l’occasion du procès Habré, d’une transparence sur l’ensemble des crimes observés par des fonctionnaires français au Tchad entre 1982 et 2013, y compris sur les victimes des
événements de février 2008 dont Ibni Oumar Mahamat Saleh.
19 signataires : Forces Vives tchadiennes en exil, Rassemblement National Républicain (RNR, Tchad), Union des Populations du Cameroun (UPC), Comité d’Action pour la Conquête de la Démocratie en Centrafrique (CACDCA), Fédération des Congolais de la Diaspora (Congo Brazzaville), Mouvement pour le Renouveau Démocratique (MRD, Djibouti, coalition Union pour le Salut National (USN)), Alliance Républicaine pour le Développement (ARD, Djibouti, coalition Union pour le Salut National (USN)), Ca suffit comme cà ! (Gabon), Mouvement pour la Restauration Démocratique en Guinée Equatoriale (MRD), Forum Citoyenneté Monde arabe (FCMA), Amicale panafricaine, Plateforme Panafricaine, Sortir du Colonialisme, Afriques en lutte, Parti Communiste Français (PCF), Parti de Gauche, Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique (FASE), Europe Ecologie les Verts.
* * *
English version
Chad : How much longer will the population be kept hostage by the worst dictator in Françafrique ?
The subject of applause when he stands beside François Hollande in Bamako, Idriss Déby the Chadian dictator has just won a seat as a non-permanent member of the United Nations Security Council : the Chadian dictator’s position has been very strongly reinforced by the war in Mali. The fight against “Jihadism” in the Sahel desert was waged by an alliance between the French army and clan troops of a head of state considered one of the worst dictators in Africa. As a result of that alliance, Idriss Déby is now positioning himself as a bulwark against Islamist terrorism in Africa or a potential sub-contractor for military and peacekeeping operations.
Money from oil has enabled the rapid strengthening of the Chadian army since 2003, without any of the profits from oil benefiting the population, even if some infrastructure is beginning to appear above ground. According to the International Crisis Group in 2009, “…oil has become a means for the regime to strengthen its armed forces, reward its cronies and co-opt members of the political class. This has further limited the political space available to the opposition and has helped keep the country in a state of political paralysis which stokes the antagonism between the regime and its opponents.” [1] The petro-state is ranked 184th out of 186 in the UNDP’s Human Development Index [2]. The Chadian government has announced a tripling of its oil production by 2015, which would place it at the same level as Congo-Brazzaville [3] . Recently, it decided to create an investment fund of $50 billion with the help of Samuel Maréchal, a former senior member of the French National Front [4]. This windfall allows Déby to finance his political activities, Gaddafi-style, in Africa. He intimidates other presidents, particularly in West Africa, and in this way he undermines democracy wherever it begins to take root.
During the intervention in Mali in May 2013, Idriss Déby was allowed to crush what little opposition still existed in Chad, with very little international response [5]. However, the repression in Chad in 2013, or even the presence of the remaining Chadian child soldiers, constitute only a very small part of the record of Déby’s 23 year reign : the massacres perpetrated by the ten thousand brutish soldiers of the Republican Guard, the extrajudicial executions, the executions of opponents, the villages burnt to the ground, the tortured or executed prisoners, the list is endless. A full inventory of the crimes committed is impossible to compile because human rights organizations have only partial powers of investigation in Chad. Déby has clearly guaranteed impunity to the people who carry out his orders. He is just as much in the habit of imprisoning or expelling his opponents, as he is in corrupting journalists, human rights activists and politicians, wherever he has a need, either in Chad itself or elsewhere.
The majority of the massacres took place in the 90s and were related to internal wars against uprisings which initially resulted from his previous massacres and the ethnic makeup of the army, and then were provoked by the grabbing of oil revenues by the presidential family and the impossibility of political change. Some of his crimes are crimes against humanity and are not subject to a statute of limitations. The international criminal justice system was developed in the early 2000s. Idriss Déby strongly supported by Jacques Chirac until 2007, has adapted his behavior to avoid prosecution by the International Criminal Court similar to what has happened to Sudanese President al-Bashir [6]. In 1990, the National Commission of Inquiry established that Habré’s victims numbered 40,000. As early as 1993, Amnesty Internatioal warned about the continuity of methods between the regimes of Habré and Déby [7]. Déby has inherited Habré’s immunity ; especially since, as Commander in Chief of the Northern Armed Forces and security adviser to president Habré until his defection in 1989, he led some of the massacres attributed to Habré, including those of ‘Black September’ in 1984 in the South, and, the putting down of the MOSANAT rebel movement between 1986 and 1988 in the Guéra region. With regard to Habré’s trial, Idriss Déby has already negotiated his immunity with the Extraordinary African Chambers in the courts of Senegal, where he is expected to testify against Habré [8].
Since 1990 the French army has not only had a front row seat in the observation of Idriss Déby’s crimes, but also in protecting him. In February 1998, at Sahr in southern Chad, after the kidnapping of four French people by Mahamout Nahor, massacres were committed on Déby’s orders with French soldiers nearby. With regard to the assassination in February 2008 of Ibni Oumar Mahamat Saleh, the leader of the democratic opposition, the French judge who led the investigation, Emmanuel Ducos, may well know the versions of the two French military advisors who were present, in particular that of Colonel Gadoullet [9]. As Habrés crimes have increased in number, the French army has continued to cooperate with him, thus comforting his impunity and contributing to a trivialization of his crimes against humanity. This collaboration has helped Déby to stay in power. France has even gone so far as to save him twice through military intervention, in 2006 and 2008. In addition, to overcome the shortcomings of the Chadian government, the French army has played a positive humanitarian and social role with its “Epervier” military hospital, or when it helps in cases of fire or natural disaster [10].
Idriss Déby has no democratic legitimacy. He arrived by force of arms. He was installed permanently in 1996 by French experts in electoral fraud at a time when Françafrique could do anything it wanted [11]. Since then he has learnt profitably from the experience built up by fellow dictators in the practice of fraudulent elections and crushing of all opposition. The last masquerade, endorsed by the European Union in 2011 following the labors of Louis Michel, the expert on how to hold elections in dictatorships, has brought no progress.
The democratization of Central Africa is currently impossible. The fates of Chad, the Central African Republic, Cameroon, Congo Brazzaville and Gabon are linked. Dictators are generally supportive of each other. This blocked state of affairs is also the result of the policy France has historically followed in the region to ensure its own supply of oil. At the moment, the European Union, which would like to start work on the defense policy it intends to present to the European Council in December, is driven by French politics, under military influence, in its alliances with the dictators of Françafrique. Democratization has been sacrificed in favor of strengthening European security and its arms industry. The French government is trying to make believe (once again) that presidents can build “peace and stability” without taking into account the nature of their regimes. The populations of these countries, deprived of credible elections, are still excluded from the debate about their own security. As a result of regaining a little “international legitimacy” Déby has both increased his external military strength and has managed to establish himself as the key player in the Central African Republic he himself destabilized [12].
On 29 October 2013, Chad will undergo the Universal Periodic Review (UPR) of the UN in Geneva [13]. This review, which is not directly binding, will evaluate what progress has been made in the establishment of the rule of law in Chad. Idriss Déby, even when accused directly, and liable to be held responsible, only lets his regime change very slowly. The recommendations made to the UPR by Amnesty International reveal the true nature of the regime and the paralyzing horror that the population has lived through for the last 23 years [14]. Although the UPR does not ask directly for truth and justice for all the crimes committed by the Chadian regime the rapid implementation of its recommendations is essential.
The Collective for Solidarity with Social and Political Struggles in Africa
calls on the French government to urgently change its policy towards Chad by : Halting
its diplomatic and military support to Idriss Déby
Providing active support to Chadian Democrats, and the establishment of the rule
of law according to the recommendations of the Universal Periodic Review
Withdrawal of French troops from Chad
On the
occasion of the Habré trial, providing total transparency with regard to all crimes reported by French officials in Chad between 1982 and 2013, with details of the victims of the events of
February 2008 including those of Ibni Oumar Mahamat Saleh.
Collective for Solidarity with Social and Political Struggles in Africa
Notes
1. 26 Aug 2009, International Crisis Group : Chad : Escaping from the Oil Trap, http://www.crisisgroup.org/en/regio…
2.
28 March 2013, International Human Development Indicators, http://hdrstats.undp.org/en/countri…
3. 29 september 2013,
Pétrole : le Tchad va tripler sa production, http://financialafrik.com/2013/09/2…
4. 02 October 2013, M&A finance s’active au Tchad, http://africaintelligence.fr/LC-/ho…
5.
09 May 2013, updated 07 June 2013, FIDH, LTDH, APTDH : Chad : Crackdown on a background of militarytensions, http://fidh.org/en/africa/Chad/chad…
6.
2 september 2008, U.N. “Human rights situations that require the Council’s attention : Report of the Special Rapporteur on the situation of human rights in the Sudan :
http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UN…
7.
21 April 1993, CHAD, Amnesty international calls for a full inquiry into army killings in the south in 1993, http://www.amnesty.org/fr/library/a…
8.
30 September 2013, Jean Bernard Padaré : l’avocat qui construit scientifiquement la perte d’Idriss Déby ITNO—Jean-Bernard Padaré, the lawyer who is bringing about the scientific loss of
Idriss Déby ITNO”, http://www.ndjamena-matin.com/artic…
9. Septembre 2009,
Amnesty : « Disparitions forcées au Tchad—Enforced Disappearances in Chad » : amnesty.fr/sites/default/files/SF09MA084_tchad.pdf, + Amnesty International Report 2009,
Chad : Enforced Disappearances, http://www.amnesty.org/en/region/ch…, + 5 March 2013, Survie : Déby redevient
fréquentable, l’impunité de ses crimes demeure, survie.org/billets-d-afrique/2013/221-fevrier-2013/article/deby-redevient-frequentable-l
10. 28 July 2011, Vers une redéfinition de la présence militaire française au Tchad ?—Towards a redesign of the French Military Presence in
Chad ?” : http://www.france24.com/fr/20110728…
11. Jerôme Grand d’Esnon and André Rouge, Verschave, Noir Chirac, 2002, p225 chap. “Légitimer le frère Déby, bourreau des Tchadiens – Legitimizing brother Déby,
Executioner of the Chadians”
12. On 23 & 24 March 2013, the Chadian special forces clandestinely fought against the
Central African army and South African soldiers of the FOMAC peacekeeping mission to create an opening in their lines through which the Séléka was allowed to enter Bangui, 8 October 2013,
AFP : “La Centrafrique, une affaire de sécurité nationale pour N’Djamena” : http://liberation.fr/monde/2013/10/…
13.
29 October 2013, Chad Universal Periodic Review, U.N. Geneva, http://www.upr-info.org/-Chad-.html
14.
31 July 2013, “Suggested recommendations to States considered in the 17th round of the Universal Periodic Review, 21 October-1 November, 2013”, http://amnesty.org/en/library/asset…
COTE D'IVOIRE: AFFAIRE MAHE en justice à Paris.
AFFAIRE MAHE : quand la Justice Française s’acharne sur les victimes !
Ci-dessus, Maître Norbert TRICAUD en compagnie de deux des proches de Firmin MAHE qui l’ont désigné pour porter plainte contre l’Etat français en sus de 4 autres parties civiles
l’affaire MAHE le mardi 11 février 2014 à 9h à la COUR D’APPEL de PARIS Pôle 2, chambre 4 (Métro Cité Ligne 4).
Nous entendons de-ci de-là que l’affaire MAHE serait morte et enterrée…Ce qui n'est pas sans nous rappeler un certain Jean-Marc SIMON qui affirmait que GBAGBO, c’était fini. Toutes proportions gardées en effet, suffit-il que ceux qui ont intérêt à occulter la vérité parviennent à museler les médiamenteurs occidentaux pour que la vérité elle-même s’efface au gré des intérêts des puissants ?
« Ce n’est pas parce que le mensonge se multiplie et se propage qu’il devient vérité et ce n’est pas parce que la vérité ne se voit pas qu’elle devient erreur » disait GANDHI.
Alors que s’est-il passé depuis le verdict inique de la Cour d’Assises du 7 décembre 2012… Médiatiquement rien ou pas grand-chose tant il est vrai que les chiens de garde de la Françafrique veillent dans ce dossier.
Pour mémoire rappelons que Firmin MAHE est ce jeune civil ivoirien étouffé le 13 mai 2005 en CÔTE D’IVOIRE à l’aide d’un sac poubelle dans un char de la force Licorne sur ordre du Général PONCET (ce n’est pas parce qu’il a bénéficié d’un non lieu plus que douteux contre son silence dans d’autres sales dossiers de la Francivoire que cela doit nous empêcher de continuer de dénoncer l’impunité dont il jouit !).
A noter d’ailleurs la perversion de notre Justice qui, dans le cas d’espèce, non seulement n’a pas fait appel, mais permet de poursuivre toute personne qui mettrait en cause ceux qui ont bénéficié d’un non lieu ou d’un verdict pour le moins clément tout en criminalisant post-mortem le jeune Firmin MAHE qui n’a jamais été jugé de son vivant, mais s’est vu imputer tous les crimes de la sous-région, au mépris des règles de droit les plus élémentaires, telles que l’existence de preuves, la fiabilité de ces dernières ou encore l’accès à la justice de ses proches. Bref sur ces sujets voir notamment quelques articles commis antérieurement(1).
Dans un article du Figaro daté du 16 janvier 2014 (2), nous apprenons que le colonel Eric BURGAUD -un des donneurs d’ordre du crime de Firmin MAHE- s’est vu retirer toutes ses décorations. Et alors quoi ? Doit-on féliciter cette Justice aux ordres qui après plus d’un an d’un verdict inique basé sur le mensonge, le faux et usage de faux, la subornation de témoins et je ne sais combien encore de manquements à tous les principes de droit les plus élémentaires consent à priver un colonel meurtrier de ses décorations ? Geste symbolique certes, et peut-être symptomatique me direz-vous. Car si on les lui enlève maintenant, c’est peut-être que le vent commence à tourner pour ses victimes et que le voile du mensonge se déchire. Gageons malheureusement qu’il n’en est rien !
Ne s’agirait-il pas plutôt de continuer de faire croire que les militaires français ont bien fait d’assassiner celui que l’on persiste à taxer de « coupeur de route » et de bandit dans le même article cité ci-dessus ? Les photos des victimes des meurtres barbares qu’on impute à Firmin MAHE ont beau avoir été prises dans le village de LOGOUALE pour certaines, à une date antérieure à celle que les amis du colonel BURGAUD et ses complices mentionnent comme étant le fait de la « bande à MAHE », il faut à tout prix continuer à justifier ce crime barbare en le légitimant par les prétendues exactions qu’on lui colle sur le dos en inversant systématiquement la victime et le bourreau (3)...
…Pendant ce temps, l’enfant de la victime vit caché quelque part en Afrique, les sœurs se terrent et rasent les murs de peur de représailles (elles ont d’ailleurs quitté la région) ; le frère aîné de la victime -Jacques- est hospitalisé depuis plus d’un an sans discontinuer avec un pronostic vital engagé à moins de bénéficier d’une greffe des deux poumons qui ne viendra pas tant que sa situation ne sera pas stabilisée. Sauf qu’on vient de lui notifier le rejet de sa demande d’asile politique après près d’un an d’un silence assourdissant de l’OFPRA qui n’a même pas daigné le recevoir en entretien comme cela se fait habituellement ; sauf que son neveu Basile a également vu sa demande d’asile rejetée par l’OFPRA qui ne craint pas d’écrire qu’il est arrivé en France en novembre 2011 avec un passeport d’emprunt, alors qu’il a atterri en France le 30 novembre 2012 avec son propre passeport tous frais payés par l’Etat français pour participer à un procès vicié dès le départ (Fabien NDOUMOU l’avocat de la famille autoproclamé depuis février 2006 a lui-même reconnu avoir été mandaté par l’Etat français et invoque aujourd’hui le secret d’Etat pour tenter de masquer sa forfaiture). C’est un imposteur qui a saboté le dossier d’indemnisation des proches de la victime en première instance, en ne déposant aucune conclusion écrite, en n’invoquant pas de préjudice moral et en ne fournissant pas le plus petit début de preuve à l’appui de sa demande de réparation du préjudice économique qui n’avait pas lieu d’être hormis en ce qui concerne le fils de Firmin. Bref, tout a été clairement ordonnancé pour que l’affaire MAHE soit complètement enterrée. Excepté la dépouille de Firmin MAHE qui elle attend toujours qu’une sépulture décente lui soit donnée en vertu d’une ordonnance aux fins d’inhumation qui date quand même de… février 2006 (4) ! Des employés de l’IVOSEP (la société de pompes funèbres qui est supposée entretenir le corps en attendant son inhumation) ont laissé entendre que c’était à la famille de payer les frais d’entretien du corps pendant ces 8 années. Ce qui n’est pas sans nous rappeler cette pratique barbare prêtée aux autorités chinoises qui iraient jusqu’à facturer la balle qui a servi à exécuter le condamné à mort.
La même société IVOSEP refuse dans le même temps de répondre à nos demandes réitérées de facture, tandis que la Justice française se prévaut de l’absence de ce document pour refuser de prendre en charge les frais funéraires, dont le montant doit s’élever à plusieurs dizaines de milliers d’Euros aujourd’hui si tant est que la dépouille de la victime y soit toujours.
Depuis le jugement d’Instance du 22 janvier 2013 (qui fait suite au verdict inique de la Cour d’Assises en vue d’indemniser les victimes), il y a eu pas moins de 4 renvois, et 4 des parties civiles n’ont même pas pu se faire représenter par un avocat digne de ce nom. Car Fabien NDOUMOU, fort de ses bons offices de « mercenaire » de la justice françafricaine, ne s’est pas contenté de mal les défendre. Il a lâchement abandonné les parties civiles à leur sort depuis le 10 décembre 2012, soit trois jours après le verdict inique de la Cour d’Assises. Il refuse d’ailleurs toujours de restituer le dossier à ses « clients » ou même à son successeur – autant dire qu’il les prive littéralement de la moindre chance d’obtenir une juste réparation de leur préjudice. Pour contrer les procédures de manquement à la déontologie que nous avions engagées à son encontre devant l’ordre des avocats, il est allé jusqu’à les faire condamner à verser 20 000€ (en même temps ce n’est pas si grave puisqu’ils ne sont pas solvables et pas prêts de l’être, d’autant que tous deux viennent de se voir couper l’Allocation Temporaire d’Attente, en dépit du recours pendant exercé devant la Cour National des Demandeurs d’Asile). Ils ont introduit des demandes d’aide juridictionnelle depuis près d’un an mais n’ont toujours pas de décision favorable, sans compter que les notifications de pièces manquantes, les décisions de caducité qui sont supposées avoir été transmises à 6 des parties civiles dans ce procès, n’arrivent jamais entre leurs mains. Sur le plan strictement humanitaire même, Jacques a été jeté dehors en plein hiver en janvier 2013, ce qui a fait dire au médecin de PONTOISE qui le suivait à l’époque qu’ « on aurait voulu le tuer qu’on ne s’y serait pas pris autrement ».
Un seul mot d’ordre : tout faire pour que l’affaire MAHE ne refasse pas surface alors que la diplomatie hollandaise inscrit résolument ses pas dans celle de son prédécesseur, avec une visite d’allégeance réciproque annoncée pour fin février 2014 (première visite de HOLLANDE en CÔTE D’IVOIRE)(5).
Car l’argent, celui de l’indemnisation des victimes, est loin d’être l’enjeu central de cette affaire. Plus que jamais, « l’affaire MAHE est l’arbre qui cache la forêt »(6) de la mainmise de la FRANCE sur une grande partie des richesses de la CÔTE D’IVOIRE au détriment du droit du peuple ivoirien à disposer de lui-même.
Nous osons affirmer qu’en ce début d’année 2014, l’affaire MAHE est un des rares dossiers portés sur la place judiciaire que la Francivoire n’a pas encore réussi à enterrer, avec la plainte de Michel GBAGBO contre SORO pour « enlèvement, séquestration, traitements inhumains et dégradants » de juin 2012 qui n’est pas non plus sans connaître de nombreuses obstructions (7) :
- Les demandes de commissions d’enquête sur le rôle de la LICORNE dans la crise ivoirienne sont toujours en souffrance sur le bureau de l’Assemblée Nationale (8) ;
- Les enquêtes sur les véritables circonstances de la mort d’Antoine MASSE (9) et de 9 soldats à BOUAKE en novembre 2004 sont au point mort, surtout après le non lieu accordé à Michèle ALLIOT MARIE (MAM rebaptisée plus à propos Mensonges Après Mensonges), déni de justice prévisible certes, mais déni de justice qu’il convient de dénoncer malgré tout (10);
- Les responsables de la centaine de morts et des milliers de blessés de la fusillade de l’Hôtel Ivoire et des autres exactions commises par l’Armée française à ABIDJAN en novembre 2004 courent toujours en dépit des actions du COPAVIL (11) ;
- Les meurtres de Guy André KIEFFER, Philippe REMOND, Yves LAMBELIN, Stéphane Frantz DI RIPPEL (12) et de bien d’autres restent sans réponse dès lors que leur résolution risquerait de mettre à jour les intérêts économiques en jeu et le rôle de la FRANCE dans leur préservation au mépris de la souveraineté du peuple ivoirien ;
- La FRANCE, les instances européennes et onusiennes qui couvrent le fonctionnement de la Cour Pénale Internationale continuent de soutenir les procédures opaques, partiales et complaisantes de la Procureur BENSOUDA à l’encontre des seuls tenants de l’ancien Régime, au mépris du respect du droit non seulement des accusés, mais également de leurs prétendues victimes(13).
A celles et ceux qui continuent de croire que l’affaire MAHE n’aurait fait qu’une victime, un dommage collatéral sans intérêt de la crise ivoirienne en quelque sorte, nous disons :
- Pourquoi dans ce cas, les autorités politiques, judiciaires, militaires, policières tant françaises qu’ivoiriennes se donnent-elles autant de mal pour étouffer cette affaire MAHE/LICORNE depuis bientôt dix ans?
- Pourquoi n’y a-t-il aucune plainte des prétendues victimes de Firmin MAHE ?
- Pourquoi les autorités illégitimes de CÔTE D’IVOIRE ne sont-elles pas partie au procès pour accréditer la thèse de la « bande à MAHE » et des prétendues exactions qu’on lui impute ?
- Pourquoi ne vérifie-t-on pas les témoignages des victimes de la région qui dénoncent les nombreux crimes qu’ils ont subis et continuent de subir depuis 2002 avec le soutien direct de la FRANCE ?
Quelques extraits des témoignages des victimes que la justice française cherche à tout prix à écarter des débats, notamment en empêchant le procès des assassins de Firmin MAHE de suivre son cours :
« Jusqu’à la rébellion de 2002, nous vivions en bonne entente avec les allogènes, en majorité des Burkinabés et des Ivoiriens venus du Nord qui pour la plupart travaillaient pour nous depuis de nombreuses années. […] nous vivions ensemble dans les mêmes villages, partagions notre vie quotidienne et nos enfants fréquentaient les mêmes écoles. Comme beaucoup de mes frères de la région, nous avons adhéré au Front Populaire Ivoirien dès sa création […] pour lutter contre le parti unique mais aussi pour une société plus juste.
Après le 19 septembre 2002, […] Les rebelles venus du Nord tuaient nos parents, violaient nos sœurs et pillaient nos terres. Il y a eu plus de 40 morts dès la première attaque. La plupart des allogènes se sont rangés du côté des rebelles. La zone assiégée par les rebelles est devenue une zone de non droit. Nous avons appris ce qui se passait en accueillant des victimes qui fuyaient leurs villages […] Nous étions à leurs funérailles lorsque des rebelles ont surgi et ont assassiné par balle […] Suit une liste de victimes dont nous tairons les noms pour ne pas mettre en danger les survivants.
Une autre fois, peu de temps avant le massacre du chef, les rebelles ont fait irruption au village, […]. Un groupe de 15/20 personnes est arrivé en Kia moteur (camion benne), escorté de quelques voitures et de motos 4x4 équipés de lance-roquettes. Quand ils sont arrivés devant la maison du Directeur de l’Ecole […], les enfants se sont réfugiés à l’intérieur. Ils étaient en vacances et géraient les téléphones au village. Les assaillants ont cassé la porte de la maison et ont arrosé les 5 enfants/étudiants du Directeur d’école. Ses 5 fils sont morts sur le coup et leurs tombes sont à […].
Le chef du village […] a également été assassiné par les rebelles. Ils sont allés dans son campement. […] Sa sœur […] a voulu les empêcher de partir avec le chef et ils l’ont tué d’un tir de Kalachnikov. Ils sont partis avec les sacs de cacao et le chef qu’ils obligeaient à porter une charge trop lourde en dépit de son extrême faiblesse. A quelques kilomètres du village, ils l’ont étranglé. Nous avons retrouvé son corps dans la brousse deux jours plus tard et nous l’avons inhumé. Là encore, sa tombe est là… »
« Donc en 2009, quand j’arrive à […], la plantation familiale de 16ha de cacao est occupée par des Burkinabé ainsi que le campement par un dénommé « Koffi » et un autre « Moussa ». D'après les infos que j’ai, ils occupaient toujours notre plantation le 11 avril 2011 lorsque les troupes rebelles aidées par l’Armée française ont fait tomber notre Président. »
« Je suis à ABIDJAN en 2011 quand survient la crise postélectorale. […] J’ai participé à la plupart des grandes marches aux mains nues en 1992, 2000, 2004, 2007, 2010, 2011 pour défendre mon pays. En mars 2011, j’ai répondu aux appels de BLE GOUDE de nous rassembler et de dormir Place de la République pour montrer à la Communauté Internationale que nous soutenions notre Président, nos institutions et que nous voulions que l’on respecte notre choix (http://www.youtube.com/watch?v=Nhmy2B3hPKo). Quand les bombardements franco-onusiens ont commencé sur le camp d’AKOUEDO, fin mars – il s’agissait d’hélicoptères français « PUMA », les gens ont commencé par fuir COCODY pris de panique. Nous étions des dizaines de milliers rassemblés autour de la Résidence Présidentielle pour soutenir Laurent GBAGBO. J’ai vu des milliers de Patriotes aux mains nues tomber. Début avril, les porte-paroles du Président nous ont demandé de partir car Laurent GBAGBO estimait que c’était lui qui était visé, que ce n’était pas la peine de mourir pour rien, comme nos frères morts en novembre 2004 en se dirigeant vers le 43ème BIMA et devant l’Hôtel Ivoire. Moi, j’ai quitté les lieux le 4 avril par la route de MPOUTO. J’ai pu regagner KOUMASSI en me faufilant entre les barrages des FRCI (Riviera 2). Avec un camarade, on a mis longtemps pour atteindre MPOUTO où on a pu prendre une barque (La Pinance) pour traverser la lagune et aller au Terminus 32. Là je suis allé me cacher dans mon Eglise jusqu’à la capture de Laurent GBAGBO et de ses proches le 11 avril 2011. Après le 11 avril, je suis resté là. Les gens de la paroisse nous envoyaient de quoi vivre et manger (nous étions au moins 6 à avoir trouvé refuge dans l’Eglise). C’est là que j’ai pu rester sans pratiquement jamais sortir au-delà d’un petit périmètre en vivant de la charité chrétienne.
« […] et […] sont morts devant moi à COCODY après nous être séparés pour avoir plus de chance de nous en sortir au niveau de la RTI quand nous avons fui la Résidence Présidentielle début avril comme je l’ai exposé plus haut. Nous avons vu les rebelles les découper en morceaux. Nous avons assisté impuissants à leur dépeçage, pétrifiés par la peur. »
Malgré tout, un espoir nouveau se fait jour dans ce dossier avec la désignation de Maître Norbert TRICAUD qui a accepté de les représenter à cette audience d’appel tout d’abord, avant de porter plainte contre l’Etat français qui devra rendre compte de sa responsabilité dans cette tragédie (14)… En espérant que cela permette à de nombreuses autres victimes de reprendre confiance, d’engager la responsabilité de l’Etat français dans toutes les affaires précitées, et plus largement la couverture de nombreux crimes barbares commis par les rebelles de 2002, sans oublier sa responsabilité dans l’accès et le maintien au pouvoir d’un régime aussi illégitime que liberticide, dont la liste des victimes ne cesse de s’allonger (15).
C’est pourquoi nous invitons toutes celles et ceux qui rejettent cette justice inique à venir massivement soutenir Maître TRICAUD lors de sa première plaidoirie dans l’affaire MAHE le mardi 11 février 2014 à 9h à la COUR D’APPEL de PARIS Pôle 2, chambre 4 (Métro Cité Ligne 4).
Contacts : 06 69 49 40 06 ou 06 10 47 67 17
Source : http://contrepoids-infos.blogspot.fr
http://contrepoids-infos.blogspot.fr/2013/05/laffaire-mahe1-pas-encore-assez-etouffee.html
http://contrepoids-infos.blogspot.fr/2013/12/et-si-laffaire-mahe-ne-faisait.html
(3) http://contrepoids-infos.blogspot.fr/2013/05/qui-veut-tuer-son-chien-laccuse-davoir.html
(4) http://contrepoids-infos.blogspot.fr/2013/05/du-droit-naturel-denterrer-ses-morts.html
(5) http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-14043.html
(6) http://survie.org/billets-d-afrique/2013/220-janvier-2013/article/affaire-mahe-l-arbre-qui-cache-la
(7) « Affaire « audition de Michel Gbagbo à Paris » : La juge française en colère contre Abidjan » publié le vendredi 31 janvier 2014 | Notre Voie : http://soutienetliberte.wordpress.com/2014/01/31/la-justice-francaise-reitere-sa-demande-dentendre-michel-gbagbo-suite-a-sa-plainte-pour-enlevement-et-sequestration/
(8) Proposition de résolution de juillet 2012 visant à créer une commission d’enquête sur le rôle de la Force Licorne en CÔTE D’IVOIRE renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement : http://www.assemblee-nationale.fr/14/propositions/pion0131.asp
(11) Voir déclaration du COPAVIL (Collectif des Patriotes Victimes de la force française Licorne) : http://news.abidjan.net/h/416215.html ;
Preuves de la responsabilité directe de la force Licorne dans cette tragédie : http://www.youtube.com/watch?v=8j5StJnIw-s ; http://www.youtube.com/watch?v=0YaJnbkWDSQ ; http://philippehua.com/2012/07/25/cote-divoire-la-victoire-aux-mains-nues-un-documentaire-de-sidiki-bakaba/
(13) Gbagbo à la CPI : comment Maître ALTIT et ses collègues ont dézingué BENSOUDA :
http://nouveaucourrier.net/gbagbo-a-la-cpi-comment-altit-et-ses-collegues-ont- dezingue-bensouda/
CPI : L’affaire Laurent Gbagbo perturbe le complot françafricain :
http://www.abidjandirect.net/index2.php?page=poli&id=8506
(14) Maître Tricaud demande que la lumière soit faite sur tous les crimes politiques en Côte d’Ivoire et au-delà : http://www.youtube.com/watch?v=bjgbKPHUSrI ; http://www.youtube.com/watch?v=LKX2QmqtgPE
(15) http://contrepoids-infos.blogspot.fr/2012/12/memorandum-en-images-sur-la-cote-divoire.html
Affaire Dieudonné : Sa mère Josiane Grué parle de son fils et des raisons de son engagement pour la justice et le droit.
Affaire Dieudonné : Sa mère Josiane Grué parle de son fils et des raisons de son engagement pour la justice et le droit.
Josiane Grué, la mère de Dieudonné, est sociologue de formation. Après avoir travaillé durant 30 ans dans l'audiovisuel d'entreprise, elle est désormais retraitée. En avril 2009, à l'occasion d'un portrait de son fils, nous avions eu un long échange de mails avec cette femme (voir ci-dessous). Sa vision - forcement conciliante avec les opinions de son fils - n'est cependant pas dépourvue d'intérêt... À l'époque, Dieudonné n'était pas allé aussi loin que lors de son dernier spectacle frappé d'interdiction. Aujourd'hui, Josiane Grué persiste : "Je défends toujours mon fils." Elle estime que les médias déforment les propos de Dieudonné...
Le Point : À partir de quand avez-vous senti poindre chez lui une conscience politique ?
Josiane Grué :En dehors du fait que son métissage lui a fait, parfois, rencontrer le racisme primaire et prendre conscience assez tôt des problèmes de discrimination, quelques événements tragiques (comme l'assassinat du jeune Ali à Marseille par un colleur d'affiches du Front national et d'autres événements politiques divers) ont éveillé sa conscience politique.
J'ai lu sur Internet que vous étiez vous-même une citoyenne engagée. Est-ce un trait de famille ? Est-ce qu'on parlait souvent politique à table ? Bref, êtes-vous pour quelque chose dans son virage vers la politique et l'engagement en faveur du peuple palestinien, par exemple ?
J'ai des opinions politiques, mais je ne suis pas vraiment "engagée". Dieudonné l'est beaucoup plus que moi et que le reste de la famille. Je ne suis pour rien dans son virage vers la politique et son engagement pour le peuple palestinien, même si je suis en accord avec lui sur de nombreux points. Ses expériences de vie, son observation du monde dans lequel il vit et ses réflexions personnelles sont seules responsables de son positionnement politique. J'oserais même dire que cette stupéfiante histoire de lynchage qu'il a vécue ces dernières années (pour un sketch humoristique à la télé !) a été plutôt formatrice pour moi. J'ai commencé à m'informer plus sérieusement qu'avant (grâce à Internet) sur les problèmes de la France et du monde. Je ne peux que l'en remercier.
A-t-il de l'humour sur lui-même ?
Il suffit d'aller voir ses spectacles pour comprendre qu'il a un fort sens de l'autodérision. Il ne s'épargne pas ! Une des forces de Dieudonné est justement cette distance étonnante qu'il peut avoir par rapport aux problèmes de ce monde, y compris les siens. Il y a là une certaine sagesse, que seuls les gens qui le côtoient régulièrement (ses spectateurs fidèles par exemple) peuvent percevoir.
Le succès est arrivé et avec lui l'argent. Comment Dieudonné a-t-il géré sa notoriété subite et son rapport à l'argent ?
Il a connu en effet une période faste où l'argent a coulé. Il a toujours gardé son sang-froid par rapport à ça. Quant à la gestion de sa carrière ou de son argent, indépendant comme il est, pouvez-vous imaginer que j'ai pu lui donner quelque conseil ?! Il a beaucoup de fans qui viennent le voir et le féliciter après ses spectacles. Je peux vous dire qu'il reste très chaleureux, très simple et particulièrement accessible. Pour résumer, il n'a jamais eu la "grosse tête". Ses spectateurs pourraient vous le confirmer.
Sa première participation électorale remonte à 1997, contre une candidate du FN à Dreux (Mme Stirbois). Comment expliquez-vous que onze ans plus tard, il demande à Jean-Marie Le Pen de parrainer sa fille et que le baptême soit effectué par un prêtre traditionaliste, l'abbé Laguérie ?
Combien de fois faudra-t-il redire aux médias que Dieudonné n'est pas au Front national et n'a jamais voté pour celui-ci. Il souhaitait rencontrer différents responsables de partis. Seul Le Pen lui a ouvert les portes et a accepté de dialoguer avec lui. Ce n'est pas parce que Dieudonné n'adhère pas aux thèses du FN qu'il n'a pas trouvé quelques points d'accord avec l'homme Le Pen. Dieudonné est un homme de dialogue depuis toujours. Il serait prêt à rencontrer n'importe quel extrémiste sioniste. Mais on a préféré diaboliser Dieudonné (plutôt que de dialoguer avec lui). C'est plus facile.
Il faut avoir un fort sens de la "dérision" et une certaine distance philosophique pour comprendre la provocation de Dieudonné dans cette histoire de baptême. Il s'en explique d'ailleurs dans son spectacle J'ai fait l'con. Je vous conseille d'aller le voir. Tout cela fait partie de son oeuvre humoristique ! Je n'irais pas jusqu'à dire que j'étais d'accord avec cette initiative... Mais Dieudonné, c'est Dieudonné.
L'abbé Laguérie est à des milliards de kilomètres de Dieudonné. Pour comprendre ce décalage énorme, il faut abandonner un moment la "pensée conforme", le conditionnement psychologique habituel, et imaginer un Dieudonné qui a dépassé certaines catégories mentales de la bien-pensance générale. Il voit les choses d'un point de vue situé hors champ, avec la légèreté de l'homme libre. Ce que vous considérez peut-être comme un horrible scandale le fait rire. Il n'est marié, ni avec Le Pen, ni avec Laguérie, ni avec personne, mais il ouvre les frontières... Dieudonné est avant tout un humaniste et un anti-communautariste. Les frontières communautaires, ethniques, religieuses l'ennuient profondément. Il n'a de cesse de les ridiculiser dans ses spectacles. La crispation identitaire de ceux qui l'attaquent semble s'opposer à cette vision globale.
L'ostracisme dont il est l'objet à la télé, vous en parle-t-il ? Cela l'affecte-t-il ? Ou bien, au contraire, est-ce que cela le renforce dans ses convictions et justifie son engagement par ailleurs ?
Ce qui ne tue pas rend plus fort. Bien entendu, il a été affecté par cet ostracisme qu'il a vécu comme une injustice stupéfiante. Desproges est allé plus loin que Dieudonné dans certains sketches et n'a jamais eu aucun problème. Autre temps, autre liberté d'expression. Cette expérience, cette connivence politico-médiatique destructrice l'ont, bien entendu, éclairé davantage sur l'état de notre société.
Vous qui militez contre les oppressions en général, approuvez-vous toutes les attitudes politiques de votre fils ? Par exemple, quand il fréquente des personnes qui nient l'existence de la Shoah (je pense à Faurisson) ou qu'un avion se soit écrasé sur le Pentagone (je pense à Thierry Meyssan). J'ai du mal à croire que vous puissiez approuver... Ou alors il y a quelque chose que je n'ai pas compris.
Vous m'attribuez une "militance" que je n'ai pas ou qui est bien tiède par rapport à tous les besoins de ce monde. Je suis une retraitée calme et tranquille. Les initiatives de mon fils me surprennent toujours et je ne peux pas dire que je les approuve, puisque je sais qu'elles le mettront en danger.
Dieudonné a effectivement fait une nouvelle provocation en invitant Faurisson au Zénith pour lui remettre non pas un "prix d'honneur" (comme pourraient le laisser supposer les commentaires outrés des médias !) mais un "prix de l'infréquentabilité". Ce monsieur nie l'existence des chambres à gaz. La loi Gayssot lui interdit d'affirmer cela, ce qui en fait un personnage infréquentable. Il nie également l'existence de Gorée, lieu important pour la mémoire de l'esclavage. Mais cela n'émeut ni les politiques ni les médias. On reproche donc à Dieudonné d'inviter Faurisson uniquement parce qu'il a osé remettre en cause l'existence des chambres à gaz. Qu'il ait pu éventuellement nier tous les autres crimes contre l'humanité, ça n'a aucune importance. Ce qui a sans doute suscité (chez Dieudonné) l'envie de cette provocation. Dieudonné, quant à lui, n'a jamais nié les chambres à gaz, mais on ne va sans doute pas tarder à affirmer qu'il les nie lui-même puisqu'il a osé rencontrer Faurisson. Je m'attends à tout !
Quant à Thierry Meyssan, je signale qu'il n'est pas le seul à remettre en cause la thèse officielle sur le 11 Septembre. En dehors de Jean-Marie Bigard et de Marion Cotillard, il y a des centaines d'experts qui ont exprimé leurs doutes avec arguments scientifiques à l'appui, et des milliers de personnes dans le monde (dont de nombreux Américains) qui ont vu les différents films (visibles sur Internet) traitant de ce sujet. Ni Dieudonné, ni moi, ni les autres ne connaissons la vérité. Il est étonnant que Thierry Meyssan soit, lui aussi, mis au ban de la société (avec menaces de mort) pour avoir donné son opinion à ce sujet.
Je suis surprise par la facilité inquiétante avec laquelle les médias peuvent diaboliser et mettre au ban de la société des personnes qui osent exprimer des opinions contraires aux leurs. Cela me semble assez inquiétant dans un pays qui se dit "démocratique".
Je reviens également sur la mémoire de l'esclavage dont il a fait l'un de ses combats. Noble cause que tout esprit républicain défendra. Mais Dieudonné ajoute une lecture supplémentaire. Si j'ai bien lu, il entre dans une compétition victimaire avec d'autres grands malheurs (la Shoah) et estime qu'il y a "deux poids, deux mesures". Est-ce une conviction partagée ? Et comment voulez-vous rééquilibrer le traitement de toutes les victimes ?
Cette question est complexe. (...) Dieudonné n'est jamais entré dans une compétition victimaire avec la Shoah. C'est au contraire quelques représentants de la communauté juive (élites intellectuelles et médiatiques) qui ont joué cette compétition victimaire. Comme si le fait de réclamer enfin ce travail de mémoire sur des siècles d'esclavage et de colonisation allait faire de l'ombre à la mémoire de la Shoah, qui pourtant ne manque pas de commémorations, films, documentaires, émissions, livres, etc. Dieudonné n'a jamais nié la Shoah. Y a-t-il deux poids, deux mesures, me demandez-vous ? Un exemple : il y a des centaines de films traitant de la souffrance juive pendant la guerre, il n'y a aucun film français sur l'esclavage. Le deux poids, deux mesures est largement "explosé" !
Pour finir, si vous deviez citer trois qualités et trois défauts de votre fils ?
Qualités : digne, courageux, non violent. Défauts : têtu, excessif..., je n'arrive pas à trouver le troisième !
Source : Lepoint.fr