Reportage sur les armes de l’ONU saisie au Cameroun.
Convoi des Nations unies: La présence d'armes confirmée dans 17 conteneurs
La quarantaine de conteneurs issus du convoi à polémique des Nations unies est finalement passée au scanner. La certitude est admise par toutes les autorités en
charge de ce dossier. De sources concordantes, l’opération a pris en compte pas moins de 72 containers issus des 38 camions semi-remorques interceptés Aux environs de la localité de Bonis, non
loin du chef lieu de la région de l’Est. A en croire des sources proches des services de la douane camerounaise, “les images réflétées par le scanner laissent clairement entrevoir des armes et des munitions à l’image de référence.”
Un constat effectué sur 17 Conteneurs parmi la quarantaine de camion du convoi stationné au stade du Groupement mobile d’intervention (Gmi N° 2), à Douala. Du reste, des camions stationnés dans
cet espace, outre celui porteur d’un camion lance-eau et, un autre portant un groupe électrogène de haute capacité, l’essentiel des conteneurs “contiennent des équipements militaires.”
Une confirmation après près de deux semaines de supputation entretenue par le mutisme forcené des autorités. Autres certitudes émises par des sources proches du
dossier, le convoi est parti de la capitale tchadienne N’djamena en direction du Port autonome de Douala (Pad) où la cargaison devait être embarquée pour la Côte d’Ivoire. “ Nous n’avons pas besoin de savoir ce que contiennent les conteneurs que nous transportons.” Ce qui compte, à en
croire les chauffeurs des semi-remorques à problème que nous avons rencontrés, “c’est que notre client nous donne un
manifeste.” Toutefois, le manifeste fourni aux conducteurs des semi-remorques mentionne que lesdits conteneurs transportent du matériel logistique.
L’opération qui engage la responsabilité du ministère des Relations extérieures (Minrex), celle de l’administration territoriale (Minadt), de la Délégation
générale à la Sécurité nationale (Dgsn), de la gendarmerie nationale et de la direction générale des Renseignements extérieurs (Dgre) semble achopper sur la décision de la plus haute autorité de
l’Etat. Selon des sources proches du dossier, “nous attendons les instructions de la haute hiérarchie pour la suite
de cette affaire.”, confie une source introduite Une affaire fortement accrochée à l’opiniâtreté du chef de l’Etat camerounais qui, semble-t-il, veut avant tout se démarquer de la
surenchère autour de la crise ivoirienne.
Selon des sources généralement bien informées, “le problème des conteneurs de l’Onu
est beaucoup plus complexe que vous ne le pensez.” Une complexité qui résiderait sur la forme et les motivations de l’Organisation des nations unies tout au long de cette affaire.
“Il faut préciser que les Nations unies ont l’habitude de faire passer leurs matériels au Cameroun.
” Cette source sécuritaire précise par ailleurs que “dans ce cas, il appartient au Cameroun de
protéger ces convois.” Or, les sources proches des milieux sécuritaires et diplomatiques soutiennent que ledit convoi aurait été découvert dans le territoire camerounais. Un fait
aggravé par “la volonté des organisateurs de ce convoi à se démarquer des procédures
habituelles.”
Nouvelles révélations sur les containers suspects de l’Onu
L’enquête de notre envoyé spécial à l’Est.
Il y a désormais un certain plaisir à rallier la ville de Bertoua à Yaoundé. Grâce au bitumage à 85% de la Nationale n° 2, le voyage est moins stressant. Hormis le
mauvais tracé du tronçon Abong-Mbang- Doumé, avec ses nombreux tournants “ accidentogènes ”, et le
tronçon Doumé-Bonis encore en voie de bitumage, aller à “ Beyrouth ”, comme l’appellent les nombreux
citadins de la ville fondée par le grand chef chasseur Baya Mbartoua, est devenu plus aisé. Fini la poussière et les incongrues rencontres avec les grumiers et autres gros porteurs. De plus en
plus on effectue même le voyage dans des bus climatisés.
Déjà, le trafic s’en ressent, qui est déjà intense sur cette voie entre la capitale tchadienne et la capitale économique du Cameroun. C’est justement par
cette voie qu’entendait passer en toute discrétion le convoi des containers parti de N’djamena pour Douala et soupçonnés de contenir des armes en direction de la Côte d’ivoire.
“ Le Libanais responsable d’une des sociétés réquisitionnées pour convoyer ces containers au port de Douala après
interrogations, est passé aux aveux complets ”
Selon nos investigations à Bertoua, contrairement à ce que nous avons affirmé dans les colonnes du Messager il y a une semaine, c’est plutôt à Bertoua et non à
Garoua-Boulaï que le convoi de ces containers portant la mention Onu ont été interpellés et immobilisés par les éléments de la gendarmerie locale. Il est établi en tout cas que la première
alerte de la gendarmerie de l’Est a été donnée à partir de la ville frontalière de Garoua-Boulaï. Les gendarmes de cette bourgade avaient remarqué quelque chose de suspect lors du passage
de ce convoi, notamment le fait que les scellés des containers étaient retournés à l’intérieur. C’est ainsi qu’à la suite ont envoyé un message à leurs collègues de Bertoua.
Les pandores veillent au grain
Le convoi arrive donc la nuit tombante au poste de contrôle mixte gendarmerie-police de la localité de Manjou, arrondissement récemment créé et situé à 6 km de
Bertoua. Nous sommes le 3 mars 2011. C’est dans la localité de Manjou qu’est situé le pont bascule, qui permet de contrôler le tonnage des gros porteurs qui empruntent cette route nationale. Les
premiers camions du convoi sont donc invités à passer sur le pont pour le contrôle.
C’est à ce moment que les agents du ministère des Travaux publics en charge du pont bascule de Manjou attirent l’attention des gendarmes sur les surcharges des
camions du convoi. Ceux-ci déclarent tantôt ne pas savoir ce qu’il y a dans les containers, tantôt qu’il s’agirait des vêtements et du coton. Futée, la jeune sous officier, que ses collègues de
Bertoua disent très aguerrie aux techniques de sécurité, constate que les poids des containers sont anormaux. Avec l’appui de ses collègues, elle aurait ainsi accentué la pression sur les
chauffeurs tchadiens pour que ceux-ci puissent ouvrir un des containers. Refus des chauffeurs.
L’équipe de gendarmes demande à voir le manifeste du convoi, et le responsable de l’Onu qui le conduit et dont le camion qui se trouve en tête porte la mention
visible de Onuci-Bouaké Côte d’ivoire. Pas de manifeste ni de responsable de l’Onu. Le ton monte. A ce niveau, nos sources à Bertoua refusent de dire si l’un des camions a été ouvert pour des
besoins de contrôle, comme précédemment affirmé dans les colonnes de votre Journal. Mais il se dit aussi dans le voisinage de la légion de gendarmerie de l’Est que parmi les éléments du
Groupement mobile d’intervention (Gmi) de Bertoua le ton serait monté entre la maréchale de logis, Edith Tiakeuh et ses éléments et les chauffeurs, au point d’obliger ceux-ci à ouvrir l’un des
containers.
C’est alors que la découverte des lances roquettes, kalachnikov aurait été faite. Immédiatement l’alerte est donnée. Le gouverneur de la région de l’Est est saisi.
Lele Lafrique envoie un de ses collaborateurs, voir ce qui se passe au pont bascule de Manjou. Au fur et à mesure que les camions du convoi arrivent et sont immobilisés. On y une quarantaine, et
près de 76 containers. Tous sont escortés à Bertoua et garés respectivement à la légion de gendarmerie de l’Est et au Gmi de Bertoua. Commence alors une longue attente pour les chauffeurs, et la
mobilisation générale des autorités administratives et de sécurité. Les pourparlers s’ouvrent au sommet de l’Etat ; le ministre de la Défense est saisi et informe le chef de l’Etat.
Une affaire de haute sécurité
Malgré la discrétion des autorités locales qui considèrent cette affaire comme étant très sensible, de bouche à oreille, la nouvelle de la présence des containers
d’armes fait le tour de la ville. Dans les bars et autres gargotes, on susure des coups de fils se passent entre les hautes autorités de la République et celles de la région de l’Est. Les
émissaires du ministère de la Défense se rendent à Bertoua. Les chauffeurs sont exploités par les limiers des services de sécurité. On apprend que leurs sociétés ont été approchées à N’djamena
pour conduire cette cargaison à Douala. Mais la question que se posent les gendarmes est celle de savoir comment un convoi de l’Onu peut ainsi partir de N’djamena et traverser tout le
Cameroun sans responsable.
Mardi 16h, arrive à Bertoua un homme de nationalité libanaise qui se présente comme responsable de la société Transafrique, qui a été chargée de transporter vers
Douala les containers. Celui-ci contacte les autorités militaires de la légion de gendarmerie pour savoir pourquoi ses camions ont été retenus. Après avoir été édifié sur les mobiles de
l’immobilisation des camions, le libanais dit d’abord ne rien connaître du contenu des containers, son rôle se limitant à les décharger d’urgence au Port autonome de Douala. Mais après échanges
quelque peu houleux, il aurait avoué qu’il s’agit bien des containers de l’Onuci qui doivent arriver au plus vite au port de San Pedro. N’ayant pas pu convaincre les autorités, il s’en retournera
à Douala d’où il serait venu.
Mercredi matin, un message venu de Yaoundé annonce aux responsables de la légion de gendarmerie de l’Est que, compte tenu du fait que Bertoua n’est pas une
ville suffisamment sécurisée, les camions et leurs containers doivent impérativement être convoyés à Douala via Yaoundé. Surtout que comme les médias commencent à en il est possible que des
bandes armées et autres bandits de grands chemins puissent venir attaquer les convois. C’est ainsi que dans la nuit du mercredi 9 mars, camions garés au Gmi de Bertoua, prennent la route de
Yaoundé, puis de Douala, fortement escorté. Ils seront passés au scanner à Douala.. Au moment où nous quittions Bertoua, ce samedi 12 mars 2011, trois camions portant chacun deux containers
étaient encore garés à la légion de gendarmerie de l’Est. Reste à savoir ce que les autorités camerounaises vont faire de ces containers que beaucoup affirment à Bertoua contenir des
armes.
(*) Envoyé spécial à Bertoua