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Le blog de afrohistorama.over-blog.com

Comprendre la crise géopolitique et géoéconomique qui secoue l’Afrique

31 Mai 2011 , Rédigé par afrohistorama, Toute l'histoire sans histoire

Comprendre la crise géopolitique et géoéconomique qui secoue l’Afrique et spécialement le golf de guinée. Pourquoi l’Afrique en particulier et le monde en général devraient-ils connaître une crise systémique globale majeure sur le plan économique et financier au second semestre 2011?

 

 

Luc-banemeck-copie-1.jpgLuc Banemeck Senior Strategist Consultant.

 

Depuis la crise des «subprimes» de 2008 aux États-Unis il y a presque trois ans une crise systémique globale secoue la planète terre. Avec le dépassement de la limite de l’endettement des États-Unis le 16 mai 2011 dernier, la faillite technique de la FED et la catastrophe de Fukushima au Japon, aujourd’hui toutes les conditions sont désormais réunies pour que le second semestre 2011 soit le théâtre de la fusion explosive des deux tendances fondamentales qui sous-tendent la crise systémique mondiale, à savoir la dislocation géopolitique globale, d'une part, et la crise économique et financière globale, d'autre part. 

 

achat des terres

  
Depuis plusieurs mois en effet, le monde connaît une succession quasiment ininterrompue de chocs géopolitiques, et géoéconomiques qui constituent  les signes avant-coureurs d'un événement traumatique majeur avenir. 

Parallèlement le système international a désormais dépassé le stade de l’affaissement  structurel pour entrer dans une phase de délabrement complet où les anciennes alliances stratégiques se délitent tandis que de nouvelles communautés d'intérêt émergent très rapidement. 

Ce qui éloigne, tout espoir de reprise économique mondiale significative et durable. Tandis que l'endettement du moteur occidental, les Etats-Unis, a atteint un seuil critique sans équivalent dans l'Histoire moderne.
 
  

Evolution comparée des parts du PIB mondial des Etats-Unis et de la Chine (2001-2016) (en parité de pouvoir d'achat) - Source : FMI / MarketWatch, 04/2011

Qui est le principal responsable de cette crise à venir ? 

Le principal responsable de cette crise sera bien évidemment le système monétaire international, ou plutôt le chaos monétaire international qui s'est encore aggravé depuis la catastrophe qui a frappé le Japon en Février dernier et devant l'incapacité des Etats-Unis à faire face à l'exigence de réduction immédiate et significative de ses immenses déficits. 

La fin du «Quantitative Easing 2 », symbole et facteur de la crise en gestation, représente la fin d'une époque, celle où le « Dollar US était la devise des Etats-Unis et le problème du reste du monde » : à partir de Juillet 2011, le Dollar US devient ouvertement la principale menace pesant sur le reste du monde et le problème crucial des Etats-Unis. 

L'été 2011 va confirmer que la Réserve fédérale US a perdu son pari : l'économie US n'est en fait jamais sortie de la « Très Grande Dépression »  où elle est entrée en 2008 malgré les milliers de milliards de Dollars injectés , comme le sait d'ailleurs l'immense majorité des Américains . Sans pouvoir lancer un QE3 (même officieusement, via ses Primary Dealers, comme elle le faisait de facto avant que le monde ne s'intéresse de trop près au marché des Bons du Trésor US), la Fed va donc contempler impuissante la remontée des taux d'intérêts, l'explosion du coût des déficits publics US, la plongée dans une récession économique aggravée, l'effondrement du cours des bourses et un comportement erratique du Dollar US, évoluant à court terme en dents de scie, au gré des influences de ces différents phénomènes, avant de lâcher brutalement 30% de sa valeur . 

Parallèlement, Euroland, BRICS et producteurs de matières premières vont rapidement renforcer leurs coopérations tout en lançant une ultime tentative de sauvetage des institutions internationales issues de Bretton Woods et du monde dominé par le tandem US/UK. Ce sera la dernière puisqu'il est illusoire d'imaginer Barack Obama, prendre  des risques politiques majeurs à un an d'une élection présidentielle.

 

Evolution de l'index Shiller du prix de vente des maisons existantes aux USA (1890-2011) (en rouge : projection) -                                                                      Source : R.J. Schiller / Steve Barry / Big Picture / New York Times, 01/2011 

 

Barrières, protections, embargos à l'exportation, diversification des réserves, frénésie autour des matières premières, inflation en hausse générale, … le monde se prépare à un nouveau choc économique, social et géopolitique.

La Chine vient d'annoncer qu'elle interrompt toutes ses exportations de diesel pour tenter de stopper une hausse du prix du carburant qui a provoqué récemment une série de grèves des transporteurs routiers. Les pays asiatiques qui dépendaient de ces exportations chinoises  doivent donc se débrouiller, d'autant plus que le Japon a agi de même suite aux conséquences de la catastrophe de Mars dernier  à Fukushima.

La Russie a cessé également d'exporter certains produits pétroliers pour limiter les pénuries et hausses de prix internes, arrêt d'exportation qui s'ajoute à celui des céréales décrété il y a déjà plusieurs mois.

Partout dans le monde arabe, l'instabilité continue à prévaloir sur fond de renchérissement des denrées de base, tandis que les interrogations sur l'ampleur des réserves et des capacités de production de l'Arabie saoudite reviennent au premier plan

 

En Afrique d’où provient une grande partie des matières premières utilisées par les pays de forte croissance, le développement économique reste bloqué par le refus de reforme politiques et économiques des régimes en place. On note une croissance économique de certains pays, taux de croissance comprise entre 5% et 10%, mais sans réel impact sur l’amélioration des conditions de vie des habitants.

 
Aux Etats-Unis, le moindre événement climatique sortant de l'ordinaire provoque aussitôt des risques de pénurie du fait de l'absence de « matelas » de sécurité du système d'approvisionnement US, sauf à mettre à contribution les stocks stratégiques . Pendant ce temps, la population réduit ses dépenses alimentaires pour pouvoir remplir le réservoir de ses voitures avec un gallon à plus de 4 Dollars. 

En Europe, la diminution de la couverture sociale et les mesures d'extrême-austérité mises en œuvre au Royaume-Uni, en Grèce, au Portugal, en Espagne, en Irlande,... font exploser le nombre de pauvres.

 

Evolution du pourcentage de la population masculine employée au sein des sept principales économies occidentales (1970-2009) -                                                     Source : The Economist / OCDE, 04/2011 

L'Union européenne vient de renforcer plus ou moins subrepticement son arsenal douanier pour résister aux importations venues d'Asie en particulier. D'une part, elle revoit tout son attirail de mesures de préférence douanière pour en éliminer tous les pays émergents, Chine, Inde, Brésil en tête. D'autre part, elle a passé discrètement fin 2010 une mesure facilitant la mise en œuvre de mesures antidumping et de sauvegarde puisque désormais une majorité simple suffira pour approuver une telle proposition de la Commission alors qu'il fallait auparavant une majorité qualifiée souvent difficile à rassembler. 

Parallèlement, les banques centrales continuent à acheter de l'or, à annoncer plus ou moins clairement qu'elles diversifient leurs réserves, tandis qu'elles prennent des mesures de plus en plus incohérentes et dangereuses, en augmentant les taux pour contrer l'inflation dans un contexte d'économies fragiles ou en récession, afin de contrer l'afflux de liquidités généré par la politique de la Réserve fédérale US. Pour paraphraser le titre de l'article d'Andy Xie, publié dans 
Caixin du 22/04/2011, « La montée de l'inflation rend fous les banquiers centraux ». 

Et côté américain, on est en effet dans le surréalisme le plus complet : alors que le pays a atteint des niveaux d'endettement insupportables, les dirigeants de Washington ont fait de cette thématique un enjeu électoraliste, comme l'illustre la question du plafond d'endettement fédéral qui a été atteint le 16 Mai dernier. Les comparaisons abondent dans la presse américaine et financière internationale avec les années Clinton où un problème du même type s'était posé sans grandes conséquences. Visiblement une partie importante des élites US et financières n'a toujours pas intégré le fait que, à la différence des années 90, les Etats-Unis d'aujourd'hui sont vus comme l' « homme malade de la planète » dont chaque signe de faiblesse ou d'incohérence grave peut déclencher des paniques incontrôlées. 

Banquiers centraux en folie, leaders mondiaux sans feuille de route, économies en danger, inflation en hausse, devises en perdition, matières premières frénétiques, endettement occidental incontrôlé, chômage au plus haut, sociétés stressées, … pas de doute, la fusion explosive de tous ces phénomènes sera bien l'évènement marquant du second semestre 2011 ! 

 

Exemples d'inflation salariale en Chine (comparaison 2011/2010) - Source : Standard Chartered Bank / Getty, 05/2011 

 Le 
Telegraph du 05/05/2011 dresse ainsi une liste intéressante des 10 raisons qui prouvent que l'économie mondiale est à nouveau en train de plonger.
 Signe des temps, le 
Financial Times, pourtant spécialisé dans les gros titres sur la fin de l'Euro depuis plus de 18 mois, publie en pages intérieures (plus discrètes) un article du 11/05/2011 intitulé « Le Dollar fait face à un danger beaucoup plus grave que l'Euro ». Tandis que The Age et le Wall Street Journal du 23/04/2011 considère que l'économie US est désormais quasiment dans la même situation que celle de la Grèce. 

 L'illustration la plus flagrante de la poursuite de cette « Très Grande Récession », comme nous l'avons appelée il y a 4 ans, c'est que la crise de l'immobilier est repartie de plus belle. Les prix sont en train de crever à nouveau les « planchers » atteints en 2009, plongeant des dizaines de millions d'Américains dans des situations économiques et financières dramatiques. Même les plus optimistes ne voient pas d'arrêt de la baisse avant 2012. Or, comme nous l'avons déjà expliqué dans de précédentes publications, l'immobilier c'est le plancher sur lequel s'est bâtie toute l'estimation de la valeur actuelle de l'économie US. La poursuite de l'effondrement des prix de l'immobilier, c'est la poursuite de la dépression économique.                                                       Source
MarketWatch, 09/05/2011 

La société d'analyse économique
Fathom a ainsi calculé que les quatre principales banques centrales mondiales (Fed, BCE, Banque du Japon et Banque d'Angleterre) ont injecté directement 5.000 milliards USD dans l'économie mondiale au cours des années 2008-2010 (cela n'intègre pas les récentes injections massives japonaises post-catastrophe, ni toutes les mesures de garanties en tout genre qui ont accompagné ces mesures). Cela représente près de 10% du PIB mondial avec le résultat que l'on connaît : un endettement public gigantesque, un endettement privé qui n'a pas vraiment diminué et des économies qui progressent à peine ou sont à nouveau en récession. Source : Telegraph, 26/04/2011 

 80% des Américains estiment que l'économie va mal. Seul 1% pense qu'elle va très bien. Source : 
CNN Money, 09/05/2011 

 La fin du QE2 signifie que le marché des Bons du Trésor US n'a en fait plus d'acheteurs (puisque la Fed achète l'essentiel des Bons du Trésor émis depuis la fin 2010 (au moins) ; ce qui, au passage, rend complètement surréaliste les articles et analyses actuelles sur le placement des émissions de Bons du Trésor US. C'est l'évidence de l' « illiquidité » effective du marché des Bons du Trésor, alors que son importance même est conditionnée à son statut de marché le plus liquide du monde, qui jouera le rôle de transmission entre QE2 et chute du Dollar, car cette situation entraînera une accélération brutale de la sortie des opérateurs hors du marché des T-Bonds, principal actif libellé en Dollars. Le phénomène provoquera dans un premier temps un besoin accru de Dollars US, puis très vite une offre excessive de Dollars à la vente. C'est le timing de ces deux phénomènes qui va conditionner l'évolution de la devise US par rapport aux autres grandes devises et à l'or au cours du second semestre 2011. 

A ce propos, l'information comme quoi le fondateur de l'ex-société de mercenaires BlackWater a été recruté par les Emirats Arabes Unis pour constituer une armée de mercenaires destinée à protéger le pays de toute attaque extérieure ou tumulte interne, illustre l'instabilité croissante des monarchies pétrolières et la fin de la confiance dans la protection américaine. Ceci dit : faire confiance à des mercenaires occidentaux est une grande preuve de naïveté, ou bien de désespoir.                                                            Source : 
New York Times, 14/05/2011 

On comprend. En effet, quand on entend Timothy Geithner, le Secrétaire d’état américain des Finances, marteler que les Etats-Unis ne tentera jamais de dévaluer le Dollar pour gagner un avantage commercial, on croit rêver. Tout le monde l'écoute poliment, fait le compte de toutes les autres raisons (dont la dette) pour lesquelles les Etats-Unis sont de facto engagés dans cette dévaluation, et achète donc de l'or, ou diversifie ses réserves hors du Dollar. Ainsi les banques centrales de Russie, du Mexique, de la Thaïlande, … continuent à acheter de l'or. Et Hong-Kong (donc la Chine) lance une attaque directe sur le monopole de Comex Gold Futures en lançant ses propres contrats de Kilo d'or. Sources
La Chine continue ainsi à se débarrasser en douceur de ses titres US et envisage même pas de diversifier les deux-tiers de ses avoirs libellés en Dollars, soit 2.000 Milliards USD. Sources : 
CNS, 29/04/2011 ; Zerohedge, 24/04/2011 

En effet, malgré les manipulations en tout genre des chiffres du chômage US, Ben Bernanke est bien obligé de constater qu'il faut continuer à soutenir artificiellement l'économie US. Pourtant quoiqu'il dise, avec la fin du QE2 et sans perspective crédible de QE3, l'économie US va se retrouver pour la première fois depuis trois ans sans stimulus majeur comme le confirme Jeffrey Lacker, le patron de la Fed de Richmond. Le second semestre va donc être un test direct de la performance d'une « économie zombie », sans source d'énergie extérieure.                                                              Sources :
 Bloomberg, 05/05/2011 ; MarketWatch, 10/05/2011 

 En tout cas pas tous, car en Asie les discussions vont bon train pour accroître et renforcer rapidement les fonds et mécanismes communs de soutien pour affronter un nouveau choc comparable à celui de Septembre 2008. Comme l'Euroland, l'Asie se découple de plus en plus du système financier américano-centré de la période pré-2008. Et au-delà des accords financiers, c'est toute la région, sous l'impulsion de la Chine, qui est en train de s'intégrer y compris en terme de réseaux de transport.                     Sources : 
AsahiShimbun, 06/05/2011 ; ChinaDaily, 30/04/2011 ; AsahiShimbun, 06/05/2011 

 Le Trésor américain se prépare d'ailleurs à un blocage sur cette question tandis que cette question semble vouloir être utilisée par les Républicains jusqu'à l'élection de 2012. Nul doute que le système financier mondial aura tranché avant cette date !  Sources : 
Christian Science Monitor, 10/05/2011 ;WashingtonPost, 27/04/2011 

 Vous pouvez donc comprendre que dans ce jeux hautement stratégique , nos pays en Afrique sont très mal partis. Alors que ces derniers pourraient bien jouer un grand rôle pendant cette période charniere de crise que traverse le monde. Car
étant détenteur de la clef de la croissance industrielle des pays du Nord. Quand est-ce-que nos dirigeant pourront-ils comprendre  cela?

 


 

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